Par Anne Gillain Mauffette
À ma grande
surprise et déception, j’ai appris, dans le
Portrait régional 2024 de l’Outaouais*, que 49.9% des enfants de cinq ans n’étaient jamais
allés à la bibliothèque de leur municipalité ou leur quartier ou très peu
souvent. C’était la même chose pour les enfants dans le reste du Québec!
Il y a donc là un apprivoisement à
faire, tant pour les enfants que pour les parents.
Et les garderies,
CPE et maternelles ont un rôle à jouer comme médiateurs de cette expérience.
Les parents
qui ne fréquentent pas les bibliothèques, n’y vont pas pour toutes sortes de
raisons : pas de bibliothèque à distance de marche, ils sont trop occupés,
n’en voient pas l’utilité n’étant pas des
lecteurs enthousiastes, sont intimidés n’ayant pas eux-mêmes eus cette
occasion, ne parlent pas encore bien la langue française, ne savent pas que
c’est gratuit, etc.
Il y a aussi
des parents qui trouvent trop compliqué la gestion des livres : ceux de la
maison, de l’école et de la bibliothèque.
Danielle Jasmin proposait cette idée aux parents : un sac réservé
aux livres de bibliothèques.
Quant à ceux
qui n’y retournaient pas à cause des arrérages de frais de retards, ceux-ci ont
été annulés dans la plupart des bibliothèques.
Je sais que
les éducatrices et enseignantes ont des livres dans leurs locaux et que dans la
plupart des écoles, il y a encore des bibliothèques (à moins qu’on manque de
locaux) que tous les cycles peuvent fréquenter y compris les maternelles.
Certaines
enseignantes de maternelles ont des systèmes de prêt qui permettent aux enfants
d’emprunter un livre et l’amener à la maison dans un sac à dos prévu à cet
effet.
Mais si on
veut que les parents s’impliquent régulièrement dans des activités de lecture
avec leurs enfants, il faut qu’ils puissent acquérir des livres et ceux-ci coûtent
cher. Heureusement les bibliothèques municipales, elles, sont gratuites. Il
faut juste oser y aller. Pour certains parents, ce n’est pas évident. Ils ont
besoin, au début, d’un petit coup de pouce et d’un accompagnement.
Se faire
lire des histoires est un des facteurs déterminant dans le développement du
goût de la lecture. Le contact parent-enfants (ou grand parent) pendant la
lecture qui allie la voix, la proximité et l’affectif, en est un élément fondateur. La variété des
textes lus, diversifie le vocabulaire et enrichit les connaissances acquises
sur toutes sortes de sujets (des facteurs de maturité scolaire).
Une collègue
ayant enseigné à Enfant Soleil à Montréal, dans un milieu à caractère
multiethnique, me disait qu’elle avait facilité l’accès des familles à la bibliothèque
en organisant des activités en collaboration avec la bibliothèque locale.
Elle avait d’abord invité, à une
rencontre de parents-enfants, une bibliothécaire. Celle-ci avait d’abord
raconté une histoire aux enfants qui étaient ensuite allés jouer et avaient
poursuivi avec les parents pour leur expliquer les différents services offerts.
Ceci est encore possible. Certaines «maternelles
quatre ans» le font d’ailleurs déjà,
lors de leurs rencontres obligatoires avec les parents.
La bibliothèque
peut aussi fournir à l’éducatrice ou l’enseignante des formulaires que les
parents pourront remplir sur place, ce qui facilitera l’inscription des enfants
lors de leur visite à la bibliothèque. Il restera alors à prendre la photo de
l’enfant et faire faire une carte plastifiée.
Ensuite,
elle avait proposé une deuxième activité où parents et enfants étaient invités
à la bibliothèque avec leurs enfants pour se familiariser avec les lieux et le
fonctionnement. Vérification faite, il y a encore des animatrices qui
accueillent des groupes pour les aider à apprivoiser ce nouvel environnement.
En fait, en
communiquant avec votre bibliothèque, ils pourront personnaliser leurs services
selon vos besoins.
On pourrait commencer
par demander aux enfants s’ils vont à la bibliothèque. Qu’est-ce qu’une
bibliothèque? Comment ils y vont? Selon les milieux, cela va sans doute être
assez variable.
Puis, au
besoin, contacter la bibliothèque du quartier de l’école et établir les
collaborations possibles.
Les bibliothécaires veulent
intensifier leurs relations avec les milieux éducatifs. Elles peuvent organiser
des animations en milieu familial, en garderie, CPE ou en classe et bien sûr à
la bibliothèque.
Elles peuvent aussi vous aider pour avoir une rencontre d’auteur par exemple.
Il est encore temps de faire un saut
à la bibliothèque d’ici la fin de l’année.
Les enfants
vont sans doute aimer et vont en parler avec leurs parents. Si vous leur
fournissez les coordonnés de la bibliothèque (adresse, site internet) sur un
petit signet par exemple, cela leur facilitera la tâche. Les parents prendraient
peut-être l’habitude d’y aller pendant l’été alors que leur horaire est un peu
plus flexible.
Et en
préparant le terrain pour l’année suivante nous arriverons peut-être ensemble à
faire bouger ces statistiques vers le haut!
Je sais, que
lorsque la bibliothèque est trop éloignée du milieu éducatif, cela veut dire
des frais de déplacement, car il est révolu le temps où on pouvait simplement
demander à quelques parents de
transporter les enfants. Mais quand on considère qu’une des fonctions du
préscolaire est de favoriser l’émergence de la lecture/écriture et d’établir de
bonnes habitudes de vie non seulement dans l’alimentation et l’exercice mais
intellectuellement, nous devons trouver des moyens pour que les garderies, CPE,
les écoles intègrent dans leur budget et leurs activités des visites à la
bibliothèque. Et que le personnel de ces milieux encourage les familles à en
faire une de leurs occupations régulière.
J’imagine
même qu’il serait possible, si notre petite communauté de parents était
suffisamment développée, que des jumelages puissent être faits entre parents
possédant une auto et d’autres non, pour qu’ils planifient ensemble des visites
à la bibliothèque. D'ailleurs, des parents font déjà du covoiturage pour des
activités sportives ou culturelles.
Mais c’est à
nous de commencer la ronde : en
aidant les parents pour qu’ils en voient les avantages et s’y sentent accueillis et à
l’aise; cela les incitera sans doute à fréquenter ces lieux de culture.
Si leurs enfants y trouvent du
plaisir et eux aussi, ils risquent d’y retourner…
À suivre donc.
* Portrait régional 2024 Outaouais. Dans quels environnements grandissent les tout-petits au Québec? L’Observatoire
des tout-petits.