samedi 5 décembre 2020

DES TECHNIQUES D'IMPRESSION

Par Anne Gillain Mauffette

Introduction

Dans son livre * et sur son blogue (thinkingwithaline.com), Cathy Weisman Topal propose une série d’explorations, facile à organiser aussi bien à la maison qu’au CPE ou en maternelle. En fait, cette activité sied à tous les âges, même aux adultes : imprimer à l’aide de petits cartons et de la gouache.

Elle peut se faire en solo, en duo, en petits groupes ou en grand groupe. Les premières expériences peuvent se faire en collectif sur un grand papier ou avec des supports individuels.

Les enfants vont pouvoir faire des compositions à partir de lignes droites puis de courbes et enfin avec des petits objets et créer toutes sortes de motifs et de représentations.

On va leur permettre de faire plusieurs ateliers car au début, ils vont apprendre à manipuler le matériel, expérimenter et constater les effets de leurs gestes. Puis ils vont pouvoir mieux utiliser les outils pour faire ce qu’ils veulent représenter.

Le matériel

 Le matériel est des plus simple et se trouve partout :

On commence par utiliser de petits cartons de 3’’ x 2,5’’.

Et de la gouache (une seule couleur) sur un plateau en styromousse.

On aura pris soin de couvrir la table de papier journal sous les feuilles ou cartons.

On va aussi donner aux enfants des feuilles pour se pratiquer, pour ensuite leur donner du papier ou des cartons plus grands.

L’auteur recommande de laisser les enfants d’abord explorer avec un seul outil pour voir ce qu’ils peuvent réaliser avec.

Puis on va ajouter des cartons de 1,5’’ x 2,5’’

Les petits cartons seront déposés sur le bord des plateaux lorsqu’ils ne sont pas utilisés.


Le processus

Les enfants vont tremper le bout des cartons dans la gouache puis appuyer le carton sur une feuille.

Premières expérimentations.              Photo© Mélany Cannavino

En combinant les lignes et les formes, les enfants vont pouvoir créer des structures complexes : des arbres, des étoiles, des édifices, des plantes, des lettres, des séquences, des lettres. Les cartons vont compenser leurs difficultés à tracer des lignes droites par exemple.  

                                  

Après avoir tracé son étoile, l’enfant avait fait plein de lignes dedans. Il trouvait qu’il y en avait trop et a glissé le carton pour remplir la forme au complet. Les enfants jeunes vont avoir tendance à traîner ainsi le carton, comme pour peindre. Il faut les laisser faire. Certains vont vous demander un pinceau pour remplir leur forme. Et on le leur donnera. On pourrait aussi leur offrir des pastels à l’huile pour enrichir leurs formes.

On peut à un moment donné, quand on voit que les enfants sont prêts pour une addition qui maintiendra leur intérêt et complexifiera leurs impressions, échanger les couleurs (ceux qui n’avaient que du rouge font un échange avec ceux qui n’avaient que du bleu).

Si on ajoute ensuite des outils courbes, cela va faciliter la construction de dômes, d’arches, de ponts et autres structures. On découpera le bord de verres en carton en deux, des rouleaux de ruban vides, des contenants de styromousse.

                                    Photo © Suzie Nadeau

En essayant une forme courbe, N. dit : celle-là va être pratique pour construire une auto.

Cette activité permet entre autres aux enfants de:

    -     Réfléchir à la façon dont ils doivent placer leur main pour faire tel tracé. Contrôler leur mouvement.

 -    D'acquérir une conscience des différents types de lignes (lignes verticales, horizontales, diagonales dans un sens puis dans l’autre, les diagonales croisées, les zigzags, les croix, des lignes plus longues et plus courtes. Puis de les remarquer dans leur environnement.

              


  
Ils vont se forger une sorte d’alphabet, de répertoire de lignes à associer entre elles.

Photo © Mélany Cannavino














De constater qu’en combinant les lignes on peut faire des triangles de toutes sortes, des carrés, des rectangles, des hexagones, octogones, des cercles des demi-cercles qui vont leur permettre de représenter toutes sortes de choses.

Les enfants s’observent et se stimulent mutuellement, se donnant des idées.

Photo © Mélany Cannavino 


 
On peut aussi ajouter de petits cylindres (rouleaux de papier de toilette, rouleaux vides de ruban mince). En utilisant une certaine sorte de cylindre, plus épais, les enfants avec lesquels j’ai expérimenté se sont aperçus que certains faisaient des bulles de couleurs.



un slinky

                                                                                                             Photo © Suzie Nadeau

 On pourra ensuite présenter aux enfants des petits objets pour enjoliver leurs compositions : petits cubes, bobines de fil, bouchon de colle ou de crayon-feutre.



Z. en voyant la bobine de fil a eu l'idée

de la pencher et la rouler sur le côté.

 

     

Puis Z. a rincé sa bobine et a recommencé avec une autre couleur et encore une autre.   

On va aussi varier les fonds : carton noir ou bleu foncé ou bleu ciel et peinture blanche par exemple 

Note: les dessins irradiants d'un point central sont plus difficiles à réaliser pour les plus jeunes. Utiliser de préférence des feuilles de 12''x 12''.

Une fois la technique maîtrisée, les enfants pourront faire toutes sortes de choses : des édifices, des machines, des arbres, des plantes, des flocons de neige, des étoiles, soleils, etc.


Les enfants vont apprendre rapidement à installer l’atelier si on le leur permet. Ils pourront ainsi retourner à l’atelier pour faire, au besoin, des affiches par exemple (pour demander de conserver une structure, faire une invitation à un spectacle, etc.).

L’auteure parle d’une rencontre de parents où les parents ont été invités à créer des édifices qu’ils ont laissés en surprise, pour leurs enfants le lendemain.

D’autres apprentissages 

Dans ces explorations les enfants vont :

Développer :

   -   une compréhension de la ligne comme un élément de base du dessin et de la construction

 -    la capacité de faire des marques et de contrôler leur placement ce qui demande des habiletés motrices, visuelles et intellectuelles.

-       le contrôle de la pression à exercer 

-   leur concentration et leur persévérance

-       du nouveau vocabulaire mathématique (le nom des formes géométriques, etc.) et autre

-       une pensée critique et créative

-        l’utilisation de ce langage des lignes pour exprimer leurs idées

-         leur langage en explicitant ce qu’ils ont fait

-         la pensée géométrique : le nom des formes et les associations de formes

-         l’habileté à analyser

-       la planification

-         le transfert de stratégies

-        leur sens esthétique

Explorer

Une petite fille trace sa main avec le carton. Photo © Suzie Nadeau

-  la composition

-      l' idée de répétition, de séquence

-        le nombre de répétitions possibles avant de reprendre de la peinture

-          différents matériaux et leurs propriétés

-         l’espace et les relations spatiales

-          les formes et leurs différences : les carrés, rectangles, différentes sortes de triangles (isocèle, équilatéral, etc.), les octogones et hexagones, les cercles, les demi-cercles

-          la façon de faire un cercle avec deux demi-cercles, des ondulations

-          des questions de longueurs, de distances, d’alternance, de nombre, de regroupements, de direction, de position

-          la notion de symétrie

-          la façon de tracer certaines figures (un hexagone par exemple)

-          certaines notions d’architecture

-          des principes de design

-         l’émergence de l’écriture : reconnaissance des noms et sons de certaines lettres et graphie en majuscules et minuscules

-         la façon de faire une lettre qui a une courbe

-         des façons alternatives d’utiliser un outil

Construire :

-         des formes, des bâtiments

-          des lettres, des mots, leurs noms

-          des motifs

-          des dessins en radiants

N. a tracé Noël avec un petit carton. « C'est Noël 2020, le père Noël a un masque».


















Certains enfants qui hésitent à dessiner peuvent faire un bond en avant en utilisant ces techniques, osant ensuite intégrer leurs nouvelles habiletés (construire une maison par exemple), dans le dessin libre.

Le rôle de l’adulte 

Le parent, l’éducatrice ou l’enseignante va soutenir et enrichir l’activité des enfants en :

-           préparant et variant le matériel et évaluer quand les enfants sont prêts pour un ajout intéressant

-          observant, écoutant et notant les mots des enfants au fur et à mesure de leurs découvertes

-          revisitant l’activité, en discutant avec les enfants à propos de leurs réalisations

-          utilisant un vocabulaire descriptif plutôt qu’évaluatif

-          posant des questions sur les lignes utilisées et les processus mentaux de l’enfant derrière leurs constructions

-          leur fournissant des livres où il est question de lignes ou d’édifices et des photos d’arbres, etc.

-           apportant des objets qui ont des motifs répétitifs (poterie, petits tapis et autres textiles) ou en amenant les enfants à en remarquer dans leur environnement (écharpes, tuques, etc.). On expliquera qu’un motif est formé quand un élément est répété plusieurs fois de la même façon.

-           observant ensemble et discutant des œuvres de peintres tels que Paul Klee, Piet Mondrian, Wassily Kandinsky

-           déposant des images de bâtiments intéressants dans le coin blocs

-          offrant des images d’affiches (de circulation, panneaux publicitaires)

-            proposant plusieurs thèmes au choix pour ceux qui seraient intéressés (sans écarter ceux des enfants qui préfèrent représenter autre chose).

-           pensant à des enrichissements pour des explorations futures (la visite d’un parent architecte ou d’un artiste, une sortie dans le quartier, une visite au musée, etc.)

-          ayant de la souplesse, en acceptant les gestes et trouvailles des enfants

Alors que les enfants avaient demandé de continuer l’atelier et avaient peint leur feuille en entier avec les cartons, une enseignante a simplement déposé des bâtonnets sur la table, les invitant ainsi, sans mot dire, à construire avec des lignes autrement.


                                     Photos © Mélany Cannavino


Conclusion

Dans plusieurs classes, lors de l’essai de ce type d’activité, ce qui nous a le plus surpris est l’attention que les enfants portaient à ce qu’ils faisaient, il y régnait un calme mêlé d’excitation.

Voici un exemple des enfants de 4-5 ans de la garderie Imagine qui ont exploré ce médium.

Et si on regarde les programmes du préscolaire ou même le nouveau programme-cycle, on se rend compte que ce genre d’activité contribue au développement de nombreuses compétences tant au niveau moteur qu’affectif, social, langagier et cognitif.

Alors… à vos cartons!                                    Anne Gillain Mauffette

Référence



 







Impliquer les enfants dans la création des coins de jeu.

Par Anne Gillain Mauffette C’est après avoir écouté une histoire d’arbre (The spooky old tree), où trois petits ours bravent leurs peurs  ...