mercredi 27 novembre 2019

Facteurs influençant l'évolution des pratiques en maternelle au Québec

par Anne Gillain Mauffette

La maternelle à temps plein : quoi faire et comment?



Qui a encore un bac à sable dans sa classe?
L’avènement de la maternelle à temps plein a donné lieu à des interrogations sur « quoi faire» et surtout «quoi faire de plus» et malgré un programme guidant les pratiques, celles-ci ont pris toutes sortes de formes, pas toujours respectueuses de l’esprit du programme d’ailleurs. Alors que certaines enseignantes se félicitaient qu’enfin «elles auraient du temps», une multiplication de programmes et méthodes ont vu le jour et fait en sorte que celles-ci se sentent encore plus pressées et que le temps de vrai jeu recule d’année en année.

Dans certains cas, des enseignantes se sentent obligées d’appliquer des méthodes prescriptives où même leurs interventions sont préprogrammées. Pourtant, elles qui connaissent «leurs» enfant sont les mieux placées pour déterminer les pratiques à adopter pour tous les enfants de leur groupe. Si elles croient encore à la place du jeu au préscolaire, celui-ci a mauvaise presse et est de plus en plus difficile à défendre malgré les connaissances existant sur son rôle vital. Il faut bien l’avouer, certaines maternelles ressemblent davantage à des classes de premières années traditionnelles

Beaucoup de choses ont joué contre le maintien du jeu au centre de la pédagogie au préscolaire : pression de certains parents (peut-être) mais surtout de spécialistes, de collègues des classes du prochain cycle (première année) de certains universitaires, de certains syndicats, de commissions scolaires, directeurs, journalistes, sous l’influence d’un discours dominant mais réducteur.

-       La diminution de la qualité du jeu chez certains enfants
 Dû à un ensemble de facteurs (dépendance aux écrans, jouets réalistes, manque de médiation, peu de jeu à l’extérieur, augmentation des activités structurées, préoccupations accrues pour la sécurité, facteurs culturels, etc.) certains enfants semblent ne plus savoir jouer ce qui a aussi poussé certaines enseignantes vers plus d’activité dirigées.

-       La conception de l’enseignement 
L’impression pour certaines enseignantes "d’enfin enseigner" a aussi contribué à la réduction du temps de jeu au préscolaire. Cela repose parfois sur une  présupposition que l’apprentissage d'une notion se fait mieux quand elle est « enseignée, complètement comprise, acceptée ou adoptée." Un manque de formation?

-       Les préjugés par rapport au jeu 
Plusieurs croient que le jeu n’aborde pas de contenus alors que le jeu ne se joue pas à vide, il traite toujours de contenus et de concepts.

mardi 26 novembre 2019

Cultiver l’émerveillement, un rapport de lecture

par Anne Gillain Mauffette
(@Anne Mauffette, tous droits réservés)

Petit rapport de lecture : quelques extraits (Anne Gillain Mauffette, novembre 2019)
Cultiver l’émerveillement : Comment préserver la soif d’apprendre de nos enfants
Catherine L’Écuyer (Québec Amérique)
«Nous devons nous convaincre que jouer n’est pas une perte de temps»

Le titre m’a tout de suite accrochée. L’émerveillement c’est ce qui éveille l’intérêt chez une personne. Ce texte identifie des facteurs qui favorisent ou qui nuisent à cet élan naturel des enfants. L’auteure déplore entre autres «l’obsession de l’utilité et la productivité en éducation qui nous fait souvent négliger l’importance d’autres dimensions de l’éducation, comme l’art par exemple» et énonce : 
«il serait peut-être temps de remettre en question cette obsession de multiplier les apprentissages structurés de l’enfant à un âge de plus en plus précoce.»
Elle nous reproche de « court-circuiter leur processus naturel de découverte du monde» en tentant de leur «inculquer» c’est -à- dire « enseigner avec insistance» « le plus tôt possible à notre enfant un ensemble de comportements et de connaissances » qui « ne concorde(nt) pas avec son processus naturel de maturation». 

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jeudi 14 novembre 2019

Le jeu symbolique soutenu par l'enseignante est plus efficace que l'enseignement explicite de la lecture

par Anne Gillain Mauffette

C’est la conclusion à laquelle la chercheure Kraismira Marinova, de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, et ses chercheurs associés  en sont venus dans l’étude « Lire et écrire dans des situations d’apprentissages issues du jeu : construire un savoir partagé» (juin 2019)

L’apprentissage par le jeu produit de meilleurs résultats en lecture /écriture que d’autres types d’enseignement plus formels. Il est plus efficace, en particulier pour les garçons. « Rien ne justifie donc  la recommandation (parfois l’imposition) d’autres types d’enseignement», enseignements plus systématiques.

Une approche par le jeu


Les serveuses prennent les commande des clients puis les attachent sur un fil pour le cuisinier.


Derrière le comptoir, deux enfants pèsent des objets (marchandises) et font semblant d'en calculer le prix, selon le poids de cette marchandise.
Lire, c'est faire du sens à partir de symboles. Ils utilisent des symboles mathématiques dans leur jeu.

Déguisé en policier, il apporte sa tablette pour noter les règlements :
«Je respecte les limites de vitesse, j’arrête au feu rouge..." 


Une affiche pour jouer à la clinique vétérinaire


Les chercheurs ont comparé les résultats de  363 enfants (pré-test et post-test) de 24  classes dont les enseignantes favorisaient soit l’enseignement explicite soit une approche par le jeu.

Ils ont constaté que les enfants qui peuvent s’adonner au jeu symbolique dans un environnement riche en écrits, tout en profitant du soutien de l’adulte dans le jeu, obtiennent de meilleurs résultats  sur les quatre variables étudiées :

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dimanche 10 novembre 2019

Utiliser la «Puissance du jeu» comme mode d’apprentissage principal pour tous les enfants d’âge préscolaire


Des recommandations de l’Académie américaine de pédiatrie :
un résumé traduit par Anne Mauffette
«En présence d’adversité dans l’enfance, le jeu devient encore plus important»
@Anne Muffette, tous droits réservés


Dans son document The Power of Play: A Pediatric Role in Enhancing Development in Young Children (La puissance du jeu), l’Académie américaine de pédiatrie enjoint aux parents, éducatrices, enseignantes, organisations communautaires, administrateurs, législateurs de privilégier le jeu sous toutes ses formes comme méthode d’apprentissage pour les enfants d’âge préscolaire, dès les premiers mois de la vie, à la maison, au CPE et à la maternelle. 

Dans ce rapport alimenté des recherches les plus récentes, les auteurs énumèrent les nombreux bienfaits du jeu sur le développement des enfants dans sa globalité : 

Le jeu 

  •  construit le cerveau des enfants : il enrichit sa structure et intensifie son fonctionnement,
  •  augmente les capacités d’autorégulation des enfants (c’est-à-dire les processus d’apprentissage plutôt que les contenus) et leur contrôle inhibiteur,
  • favorise leurs habiletés cognitives, sociales et socio-émotionnelles,
  • augmente la curiosité qui aide la mémoire et l’apprentissage, stimule leur créativité,
  • donne aux enfants un sens de leur capacité d’agir et les moyens pour faire valoir leurs idées et devenir des meneurs,
  •  leur permet d’identifier ce qui les intéresse et ce qu’ils préfèrent, afin de passer de la dépendance à l’indépendance,
  • les aide à apprendre à prendre des décisions, à collaborer, à négocier, à régler des conflits grâce aux mots, 
  •  les rend progressivement maîtres de leurs fonctions exécutives, leur apprend à écouter des consignes, à diriger leur attention et à se concentre sur des tâches,
  • permet aussi d’apprendre à évaluer les risques, expérimenter et évaluer leurs limites, nourrit le langage (plus sophistiqué) et la pensée,
  •  les familiarise avec les termes spatiaux et développe des concepts mathématiques,
  • diminue le stress dont celui des transitions (des enfants qui redoutaient l’entrée au préscolaire ont vu leur anxiété diminuer de moitié quand ils bénéficiaient de 15 minutes de jeu plutôt que de la lecture d’une histoire), le jeu construit la résilience.

 Les auteurs :
  • insistent sur les effets bénéfiques du jeu sur la santé des enfants : contrer l’obésité, augmenter la coordination, l’agilité, l’équilibre, diminuer la fatigue, le stress, les blessures et la dépression. Le jeu est considéré comme un antidote à l’impulsivité, à l’agressivité et aux émotions incontrôlées. Il développe les habiletés motrices tant globales que fines. Il les informe sur les termes spatiaux temporels.
  • Ils mettent  l’accent sur l’importance du jeu à l’extérieur et des récréations. Ils encouragent  les jeux de « tiraillages» qui favorisent «l’acquisition d’habiletés à la communication , la négociation » et le développement de l’empathie et de l’intelligence émotionnelles, les enfants encadrés apprenant à ne pas faire mal à l’autre.
  • Ils nous avertissent des méfaits de la privation de jeu.  Elle est associée, entre autres, à un accroissement du déficit d’attention et d’hyperactivité. Ils condamnent l’accent mis sur les activités didactiques, soulignant que l’enseignement explicite limite la créativité des enfants. 


mardi 5 novembre 2019

Les enseignantes à l'éducation préscolaire ressentent-elles une pression pour "scolariser" leur approche?

par Anne Gillain Mauffette

Selon une étude récente au Québec, la réponse est oui :

Une étude réalisée en 2018 auprès de 111 enseignantes à l’éducation préscolaire, en exercice au Québec, a mis en évidence que la plupart des enseignantes ayant participé à l’étude ressentent une pression à adopter des pratiques scolarisantes pour les premiers apprentissages du langage écrit.


Image by _Alicja_ from Pixabay

La pression ressentie prend la forme d’attentes élevées envers un apprentissage concret de l’écrit et envers une préparation pour la première année, lesquelles ne correspondent pas aux attentes prescrites par les programmes d’éducation préscolaire.

Une des formes de pression souvent identifiée par les participantes est la proposition/imposition d’utiliser des trousses pédagogiques conçues pour un enseignement systématique de la lecture. Cette pression vient principalement de la direction d’école, la commission scolaire.

La pression ressentie par les enseignantes pour l’éducation préscolaire
Par Krasimira Marinova et Roxane Drainville
Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue 

 Revue canadienne de l’éducation
42:3 (2019) 


samedi 2 novembre 2019

Le jeu libre, combien de temps doit-on y consacrer à la maternelle 4 ans ?


Voici ce qu'en dit le programme d'éducation préscolaire 4 ans, en page 9 :

En jouant, l’enfant apprend notamment à être autonome. Il fait des choix, prend des décisions, a des idées, fait des scénarios, se fait comprendre des autres, joue souvent le rôle de conciliateur ou de médiateur et trouve des solutions. Engagé dans le jeu, il apprend à se concentrer sur quelque chose, à ne pas se laisser distraire. Le jeu sollicite à la fois les aspects affectif, social, moteur et cognitif. Il est outil de communication, d’expression et d’action.
Pour que chaque enfant s’y engage, on doit prévoir suffisamment d’espace et de temps. On peut penser à une ou deux périodes de 45 minutes par jour, puisque si les enfants savent qu’ils ne disposeront pas d’assez de temps pour déployer leur jeu, ils ne s’investiront pas et le jeu restera superficiel. Le jeu à l’extérieur occupe une place importante au regard de la motricité et du développement des habiletés sociales et doit s’effectuer sur une base régulière.
Pour développer son plein potentiel, l’enfant a cependant besoin de soutien afin de bien s’intégrer dans le jeu et de le complexifier progressivement

Quelques idées d’expériences à faire à l’extérieur

  Par Anne Gillain Mauffette Il ne s’agit pas de reproduire une classe à l’extérieur avec tableau etc. mais de profiter de ce que l’exté...