Des recommandations de l’Académie américaine de pédiatrie :
un résumé traduit par Anne Mauffette
un résumé traduit par Anne Mauffette
«En présence d’adversité dans l’enfance, le jeu devient encore plus important»
Dans son document The Power of Play: A Pediatric Role in Enhancing Development in Young Children (La puissance du jeu), l’Académie américaine de pédiatrie enjoint aux parents, éducatrices, enseignantes, organisations communautaires, administrateurs, législateurs de privilégier le jeu sous toutes ses formes comme méthode d’apprentissage pour les enfants d’âge préscolaire, dès les premiers mois de la vie, à la maison, au CPE et à la maternelle.
Dans ce rapport alimenté des recherches les plus récentes, les auteurs énumèrent les nombreux bienfaits du jeu sur le développement des enfants dans sa globalité :
Le jeu
Le jeu
- construit le cerveau des enfants : il enrichit sa structure et intensifie son fonctionnement,
- augmente les capacités d’autorégulation des enfants (c’est-à-dire les processus d’apprentissage plutôt que les contenus) et leur contrôle inhibiteur,
- favorise leurs habiletés cognitives, sociales et socio-émotionnelles,
- augmente la curiosité qui aide la mémoire et l’apprentissage, stimule leur créativité,
- donne aux enfants un sens de leur capacité d’agir et les moyens pour faire valoir leurs idées et devenir des meneurs,
- leur permet d’identifier ce qui les intéresse et ce qu’ils préfèrent, afin de passer de la dépendance à l’indépendance,
- les aide à apprendre à prendre des décisions, à collaborer, à négocier, à régler des conflits grâce aux mots,
- les rend progressivement maîtres de leurs fonctions exécutives, leur apprend à écouter des consignes, à diriger leur attention et à se concentre sur des tâches,
- permet aussi d’apprendre à évaluer les risques, expérimenter et évaluer leurs limites, nourrit le langage (plus sophistiqué) et la pensée,
- les familiarise avec les termes spatiaux et développe des concepts mathématiques,
- diminue le stress dont celui des transitions (des enfants qui redoutaient l’entrée au préscolaire ont vu leur anxiété diminuer de moitié quand ils bénéficiaient de 15 minutes de jeu plutôt que de la lecture d’une histoire), le jeu construit la résilience.
- insistent sur les effets bénéfiques du jeu sur la santé des enfants : contrer l’obésité, augmenter la coordination, l’agilité, l’équilibre, diminuer la fatigue, le stress, les blessures et la dépression. Le jeu est considéré comme un antidote à l’impulsivité, à l’agressivité et aux émotions incontrôlées. Il développe les habiletés motrices tant globales que fines. Il les informe sur les termes spatiaux temporels.
- Ils mettent l’accent sur l’importance du jeu à l’extérieur et des récréations. Ils encouragent les jeux de « tiraillages» qui favorisent «l’acquisition d’habiletés à la communication , la négociation » et le développement de l’empathie et de l’intelligence émotionnelles, les enfants encadrés apprenant à ne pas faire mal à l’autre.
- Ils nous avertissent des méfaits de la privation de jeu. Elle est associée, entre autres, à un accroissement du déficit d’attention et d’hyperactivité. Ils condamnent l’accent mis sur les activités didactiques, soulignant que l’enseignement explicite limite la créativité des enfants.
- Ils démontrent qu’il n’y a pas de gains à un enseignement systématique formel en éducation préscolaire. Par exemple, une expérience récente d’intervention précoce en mathématique en classe préscolaire n’a démontré à peu près aucun gain dans les résultats plus tard à l’élémentaire. Ils suggèrent que nous laissions les enfants apprendre en observant et en s’engageant activement, plutôt que par mémorisation passive ou instruction directe, car les enfants qui jouent sont engagés dans des découvertes signifiantes et se comportent comme des scientifiques. Ils découvrent mieux par eux-mêmes, par exemple, les mécanismes de cause à effet quand ils mènent eux-mêmes leurs apprentissages.
- Ils identifient les obstacles au jeu, dont la concurrence avec les écrans.
- Ils nous renseignent sur les types de jeux qui favorisent davantage les habiletés des enfants, dont les jeux traditionnels tels les blocs par exemple, préférables aux jeux digitaux. Les jeux peuvent être classés comme étant auto dirigés, dirigés ou guidés par l’adulte. Le jeu auto dirigé ou jeu libre est qualifié comme «crucial pour l’exploration du monde par les enfants».
- Ils écrivent le rôle des adultes : parents, éducateurs et enseignants doivent jouer eux-mêmes avec les enfants et les soutenir dans leurs jeux. Le jeu consolide la relation entre l’adulte et l’enfant et diminue, tant chez l’enfant que chez l’adulte, le niveau de stress. Il favorise «des relations sécuritaires, stables et nourricières». Le jeu avec l’adulte amène souvent de l’étayage. Il permet à l’adulte de mieux connaître l’enfant. Les adultes doivent aussi apprendre à reconnaître les apprentissages faits dans le jeu.
- Ils citent des recherches qui indiquent que les enfants apprennent beaucoup mieux quand ils ont un certain pouvoir, un certain contrôle sur leurs actions et peuvent jouer un rôle actif dans leurs apprentissages. Ils recommandent d’opter pour des méthodes innovatrices pour permettre aux enfants de mieux apprendre et font mention entre autres du modèle des écoles préscolaires municipales de Reggio Emilia. Le modèle éducatif optimal est décrit comme celui où« l’enseignante implique les enfants dans des activités qui favorisent les habiletés à l’intérieur de leur zone optimale de développement, ce qui est accompli davantage par le dialogue et le soutien».
- Ils insistent sur l’importance d’évaluer la maturation globale de l’enfant et non simplement sa maturité scolaire.
Conclusion :
L’Académie souligne que l’accent sociétal accru sur la préparation aux apprentissages scolaires (…) a mené à un accroissement des activités structurées axées sur l’obtention de résultats académiques aussi tôt qu’en classe maternelle, avec une diminution parallèle de l’apprentissage par le jeu.» Pourtant quand le jeu manque dans la vie des enfants, le stress peut inhiber, entre autres, le développement des fonctions exécutives et l’apprentissage de comportements prosociaux. Elle reconnait que le jeu est «fondamentalement important pour l’apprentissage d’habiletés nécessaires au 21e siècle telles que la résolution de problèmes, la collaboration, la créativité qui demandent une maîtrise des fonctions exécutives et sont critiques pour la réussite à l’âge adulte». On y lit : « La maternelle devrait offrir des occasions de jeu collaboratif et de manipulations exploratoires.»« Au lieu d’insister exclusivement sur la récitation de l’alphabet, la littératie précoce, l’utilisation de « flash cards», des jeux à l’ordinateur et d’enseigner les contenus des tests (…), il vaut mieux cultiver la joie d’apprendre par le jeu qui a plus de chances d’encourager la réussite scolaire à long terme.»
Nous vous invitons donc à faire comme les pédiatres et militer pour préserver le temps de vrai jeu, «afin de protéger l’intégrité de l’enfance».
Alors que les maternelles 4 ans, accueillant beaucoup d’enfants issus de milieux moins favorisés économiquement, se multiplient et que le nouveau programme pour les enfants de 4 à 6 ans est modifié, nous espérons que ces recommandations seront prises très au sérieux.
Vous trouverez ici : un résumé plus étoffé que celui-ci (18 pages) Vous y trouverez également les 145 références.
Note : Il existe aussi une traduction du document en entier (29 pages) que vous pouvez demander à l’auteure.
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