Par Anne Gillain Mauffette
En savent-ils assez?
Pourquoi ce
doute?
Est-ce la
perspective des dépistages par les orthopédagogues qui nous inquiètent, nous
sentant redevables des résultats.
(Voir l’article sur les
dépistages : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2020/11/accueillir-dabord-que-penser-des-tests.html)
Est-ce
l’idée que les enseignantes de première année
seraient peut-être insatisfaites des prestations de leurs élèves et donc
de la nôtre? Y aura-t-il des comparaisons entre les groupes, certains « plus
avancés» que les nôtres?
Ou à cause d'autres formes de pression (direction, administration, parents)?
On dirait
tout d’un coup, qu’on sent une urgence : on voudrait qu’ils soient rendus
plus loin, plus vite et on a tendance à vouloir augmenter la cadence.
Certaines
s’inquiètent des enfants qui n’ont pas compris la fusion de lettres, par
exemple, et on se met à échanger des trucs sur celles-ci alors que ce n’est
même pas dans les attentes de fin de cycle et que c’est au programme de
première.
Pourquoi
cette préoccupation sur un seul élément du programme alors qu’il n’y a pas
de contenu prescrit au préscolaire?
(Voir l’article : https://jeulibrequebec.blogspot.com/search?q=Pas+de+contenu+prescrit)
Comme
spécialistes du développement de l’enfant et du jeu, est-ce que c’est parce
qu’on se sent « enseigner» davantage, quand on parle de lettres? Est-ce le
critère principal sur lequel nous nous jugeons comme enseignantes?
Pourtant si
on examinait nos observations du début de l’année à maintenant, on constaterait
les progrès immenses parcourus dans tous les domaines y compris
l’apprivoisement de l’écrit.
(Voir
l’article : Comment les différents types de jeux aident-ils les enfants à
développer les composantes de la lecture : https://jeulibrequebec.blogspot.com/p/p_26.html )
Et si on
continuait à laisser les enfants jouer, si on allait dehors alors qu’il fait
beau, si on les laissait profiter de cette liberté si précieuse qui ne
reviendra pas?
Bien sûr on
va continuer à leur offrir tout ce qu’il faut pour poursuivre leurs découvertes
du monde de l’écrit et à comprendre le
fonctionnement de notre système graphique en leur fournissant toutes sortes de
matériaux en rapport avec les lettres, les mots (étampes, lettres magnétiques, des
abécédaires rigolos, histoires, documentaires, etc.) et profiter de toutes les
occasions pour faire remarquer une rime, des similitudes entre des mots, etc. On
va aussi continuer à encourager toutes les tentatives spontanées d’écriture (dans
le sable, sur le rétroprojecteur, la table lumineuse, l’asphalte, avec de
objets polyvalents, dans leurs jeux symboliques et sur papier) des enfants.
Bref on va continuer à les accompagner sans se (les) presser.
(Voir des idées dans l’article
Comment étayer dans un groupe l’émergence de l’écrit : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2021/04/les-lettres-parlons-en-2.html )
Chaque
enfant accède, progressivement, à sa façon, au code de l’écrit : il a déjà
commencé avant la maternelle et va poursuivre son cheminement. Certains enfants
ont eu certains avantages et arrivent avec une plus grande connaissance du
langage et plus de connaissances ou d’intérêt par rapport à l’écrit. Cela ne
fait pas des autres, des enfants
vulnérables, en retard et de futurs décrocheurs ou illettrés : à
nous d’enrichir leurs expériences sans les bousculer. Laissons-leur du temps
pour apprendre.
Pour des exemples de cheminement de deux enfants, un
de trois ans à 4 ans et l’autre de 4 à 6 ans, voir les articles Les lettres
parlons-en : Première partie, première section: La
trajectoire de Nathan Première partie, deuxième section: La
trajectoire de Guillaume).
Après tout,
la maternelle n’est pas obligatoire et les enfants en Suède sont initiés à
l’enseignement formel de la lecture à 7 ans et ne s’en portent pas plus mal.
On n'a pas besoin,
en fin d’année, d’imiter les classes traditionnelles de première année (bureaux
en rangée, rangs, etc.) pour assurer une meilleure transition aux enfants.
Prévoir des visites, bien sûr. Mais si pour assurer un passage plus doux, on
proposait plutôt aux enseignantes de première année de leur prêter des jeux,
appréciés des enfants en cette fin d’année, afin que les enfants retrouvent en
début de première année, avec plaisir, des éléments familiers et qu’ils aient droit
à des moments de jeu où ils se sentent compétents et à l’aise. L’enseignante
serait à loisir de les connaître sous leur vrai jour, tant au niveau des
comportements que leurs connaissances de tous ordres.
Alors,
respirons, relaxons, profitons de ces derniers moments avec ces enfants auxquels
nous nous sommes attachés. Explorons notre environnement avec eux, jouons, créons,
rions et faisons-leur confiance. Ils s’en souviendront.
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