lundi 7 avril 2025

Stimuler le développement psychomoteur au préscolaire quatrième partie

  Pour voir la troisième partie:https://jeulibrequebec.blogspot.com/2025/04/stimuler-le-developpement.html

Composantes multiples :

Bien sûr il est difficile de catégoriser certains mouvements dans une seule composante. En fait la plupart des actions en sollicitent plusieurs. Elles sont souvent liées : l’organisation spatiale va dépendre du schéma corporel et de l’organisation de la perception.

Exemples :

-           Lancer un ballon dans un cerceau ou un panier ou sur un objet, va demander non seulement de la coordination mais d’évaluer la distance (notions spatiales), adopter la direction de son geste (dissociation, relation spatiale), utiliser sa conscience de son corps, etc. Si l’objet est en mouvement (comme au ballon chasseur par exemple): l’enfant devra anticiper la vitesse du déplacement, la trajectoire et adapter la force et la direction de son geste.

            Les jeux de mémoire par exemple, demandent de l’attention, de percevoir des différences et ressemblances visuelles et de se rappeler l’endroit où les cartes étaient situées, donc de l’orientation spatiale.

-          Allier le mouvement et l’expression graphique (qui est aussi mouvement), comme on le voit dans la plupart des vidéos de Segni Mossi, font de ces propositions des activités très complexes et complètes alliant la conscience du corps, le développement d’un riche vocabulaire corporel, le sens de l’espace et de l’orientation, la motricité fine, le rythme, l’observation des autres,  etc.

Voir : https://www.facebook.com/share/v/1A4FjC6vWq/

-         Les jeux traditionnels

Ils travaillent souvent plusieurs composantes en même temps.

· La cachette

Photo Marie Jobin                                      Photo Garden Gate

C’est un jeu qui parait simple mais qui demande tout un apprentissage. Il demande par exemple de savoir si notre corps peut être contenu dans quelque chose ou être vraiment dissimulé dans un endroit. Il faut anticiper la distance et la vitesse du chercheur, les comparer avec la distance à parcourir et sa propre rapidité pour évaluer si on a des chances d’arriver au but sans être pris. L’enfant doit exercer son orientation spatiale (se rappeler où est le but par rapport à sa situation).

Voir L’article sur la cachette : https://jeulibrequebec.blogspot.com/p/la-cachette.html

· Les jeux de poursuites

Jeux de motricité globale par excellence, ces jeux développent aussi chez les enfants une multitude d’habiletés. Ils renforcent leur système cardiovasculaire et pulmonaire, leur donnent de l’endurance tout en leur faisant travailler l’anticipation des déplacements, évaluer leur vitesse et s’orienter dans l’espace. Sans oublier le langage (décider qui a la tague) et la résolution de problème dans les conflits («tu ne m’as pas touché!»)

Voir la vidéo sur les poursuites : https://youtu.be/mOrjnkkkiHs?si=MCJ7jMbDyzQVB-zE

· Les jeux de ballons (lancés ou frappés) amènent à évaluer les distances, à surveiller d’où vient le ballon et vers où le relancer (orientation spatiale) et adapter ses déplacements en conséquence ainsi que sa force et maîtrise sa motricité fine.

Exemple :

-          Une balle ou un ballon suspendu va forcer l’enfant avec sa raquette, à anticiper la trajectoire dans l’espace et la vitesse du retour du projectile.

· Le jeu du foulard ou du petit cochon, est assez complexe au niveau l’orientation spatiale. Il demande de s’orienter dans l’espace : tourner dans le bons sens pour courir derrière et rattraper le collègue qui a déposé le foulard ou autre, retrouver sa place.

· La «chaise» musicale :

Disposer les chaises en rond dans l’espace  demande de l’organisation spatiale, des notions spatiales et de l’orientation spatiale. Marcher, sautiller exercent la motricité globale.

Tourner dans le bon sens autour des chaises exige de l’orientation et des notions spatiales. Réagir rapidement à  l’arrêt de la musique demande de l’attention et de l’inhibition, repérer les chaises disponibles exige de l’attention, de l’orientation spatiale, courir s’y asseoir, de la motricité globale. Si elle est collaborative c’est-à-dire qu’on enlève une chaise mais pas de joueur (pas de perdants) on augmente les occasions de contact.

· Le jeu de poches et toutes les formes de lancer font travailler la notion de direction du geste, l’évaluation de la distance et de la force à exercer, de relâcher l’objet au bon moment.

· Le jeu de pas de géants pas de souris travaille la notion de grandeurs, de distance et l’inhibition.

L’environnement

On peut faire de la psychomotricité en tout temps et partout : dans la cuisine (motricité fine), dans un local ou en classe dont on aura poussé les meubles (ensemble), dans une salle prévue à cet effet (salle de psychomotricité, de danse, au  gymnase), dans un corridor, au parc, dans le quartier, en promenade. Idéalement, il faudrait une salle de psychomotricité dans chaque garderie et CPE

Photo Danielle Jasmin

 Mais le milieu qui s’y prête le plus et qui est le plus disponible est certainement l’extérieur. Surtout pour la motricité globale. Encore faut-il qu’il y ait un minimum de matériel disponible et que les adultes ne soient pas trop craintifs par rapport aux risques.

Qu’est-ce que votre environnement extérieur offre aux enfants comme variété d’activités motrices?

Photo Danielle Jasmin

Photos Garden Gate

Les randonnées en forêt sont d’excellentes occasions de motricité.

Mais même dans une cour juste asphaltée, des jeux sont possibles.

                                                                                Photo Peachtree            

 

Le matériel

Les interactions des enfants avec les matériaux, les objets vont leur apporter des informations et connaissances.

Quand on sort du matériel, on va laisser les enfants d’abord découvrir ce qu’ils peuvent faire avec, en exploration libre. Puis, selon ce que vous observerez, vous pourrez proposer des variantes, d’autres utilisations et organisations.

On sait si un matériel est pertinent, en observant ce que les enfants font avec, sans l’intervention de l’adulte. S’ils l’abandonnent rapidement, par exemple, c’est soit qu’ils ne le trouvent pas intéressant soit qu’ils ne savaient-il pas comment s’en servir auquel cas nous proposerons certains usages possible.

Ce qui va se passer dépend aussi du nombre d’objets. Les caractéristiques des objets vont suggérer certains comportements.

Exemples :

 Avec des cerceaux

-          Les enfants jouent à deux avec un ballon et se lancent le ballon en lui faisant faire un rebond dans le cerceau. (lancer, notion de distance, d’à l’intérieur donc de notion spatiale). Ils doivent diriger leur geste (contrôle moteur, direction  donc orientation spatiale), ajuster leur geste de réception à la hauteur du rebond et la vitesse du ballon

-          Dans le cerceau musical, quand la musique arrête on doit se retrouver dans les cerceaux (on peut ajouter la consigne à deux, à  trois, à quatre, etc., ajoutant aux composantes psychomotrices (déplacements, perception visuelle et auditive, ainsi l’aspect dénombrement et communautaire).

C’est pratique d’avoir du matériel spécifique de psychomotricité ou d’éducation physique mais souvent on peut se servir de matériel polyvalent, récupéré et même en fabriquer et même impliquer  les enfants.

On peut par exemple créer, avec les enfants (motricité fine),  des cibles en carton. Des balles avec du papier style journal et du «tape». Des bâtons en papier roulé également qui deviennent des gourets pour pousser des balles ou des bâtons pour les frapper. Ou peut aussi utiliser des rouleaux de papier d’emballage. Des boîtes à chaussures et d’autres plus grandes dans lesquelles on peut s’asseoir (en plus grand nombre que les enfants) peuvent être utilisées comme ils le veulent.

Des demi-contenants (bouteilles) de savon liquide à linge peuvent devenir des raquettes pour attraper des balles.

Vous n’avez pas de filet, une simple corde habillée de rubans fera l’affaire.

De simples  bâtons espacés au sol, peuvent servir d’obstacle pour favorise les sauts.

Des chaises peuvent servir pour faire des zig zag, être assis et se passer le ballon au-dessus de la tête, ramper dessous, etc. En fait, demandez aux enfants de trouver des utilisations possibles (à la cantonade, chacun suggérant une idée, ou par équipe, les enfants explorant d’abord puis démontrant à tout le groupe leurs trouvailles).

-         

-          L’importance des autres

Regarder les autres est une grande source d’inspiration pour les enfants. Ils acquièrent de nouvelles informations, différentes façons de faire. Ils s’inspirent de ce qu’ils font tout en apportant des variantes personnelles ce qui résulte en des connaissances et des habiletés. Dans un groupe, chacun profite de l’expérience de l’autre ce qui influence l’activité de l’ensemble.

 On peut donc aussi parfois alterner les spectateurs et les acteurs.

Le rôle de L’adulte

Son premier rôle est d’observer les enfants. L’observation des comportements spontanés des enfants nous explique comment ils apprennent et ce qu’ils apprennent.

Il peut même  les filmer pour mieux y revenir et noter comment ils bougent, ce qu’ils font avec les objets. Il va pouvoir identifier leurs capacités et leurs besoins. Il doit pouvoir déduire des actions des enfants, les composantes mises en jeu ou pas et planifier du matériel et proposer des expériences adaptées.  «Responsable de la qualité et de la  diversité des moyens à mettre en œuvre» (2 A p.48), Il doit connaître et savoir inventer des moyens pour favoriser le développement sensorimoteur des enfants et pouvoir les animer.

Il peut aussi proposer des problèmes à résoudre par les enfants.

Exemples : :

-          Comment déplacer un bloc sans utiliser les mains par exemple  

-          Comment faire des ponts avec leur corps d’abord seul puis à deux.

Il lui faut réserver du temps pour l’expression motrice spontanée ainsi qu’orientée.

Et faire attention qu’il n’y ait pas trop de temps d’attente : proposer deux ou quatre lignes qui sont en action en même temps par exemple.

Il peut aussi proposer des sorties qui vont inciter les enfants à bouger et enrichir leur bagage e mouvements.

Il est responsable de l’organisation matérielle, des situations proposées et de l’aménagement d’un environnement adapté aux besoins sensorimoteurs des enfants.

Les liens avec le programme

Toutes les composantes psychomotrices ont une influence sur le développement de toute la personne.

Proposer des activités motrices aux enfants, n’est  pas «encore une autre chose à faire», mais bien une  façon de vivre le programme pleinement, dans le plaisir de bouger. Car les composantes de la psychomotricité sont en lien direct avec les compétences inscrites dans le programme et non seulement celles concernant le domaine physique et moteur mais tous les autres. Nous avons pu voir que par ces expériences l’enfant va :

-          Accroître ses habiletés motrices

-           Construire sa connaissance de soi et acquérir un sentiment de confiance

-          Développer des relations positives avec les autres, une appartenance au groupe et des habiletés sociales

-          Identifier ses sensations et sentiments

-          Augmenter ses fonctions exécutives (attention, mémoire, autorégulation)

-          Développer du vocabulaire en rapport avec son corps, ses mouvements et son environnement

-          Acquérir les habiletés lui permettant d’apprendre à lire et écrire

-          Acquérir les bases nécessaires à la compréhension du raisonnement logique et des notions mathématiques et des sciences physiques.

Elles ont aussi un impact les apprentissages « scolaires». Lecture de gauche à droite, suivre une ligne des yeux, reconnaître les formes des lettres, écrire en représentant et en plaçant les lettres et les mots dans l’ordre, avec les espaces appropriés, sur une ligne dépendent de la maîtrise de celles-ci.

 Reconnaître les formes géométriques et les représenter, les différentes sortes de lignes, le concept de mesure, de nombre, de quantité, de symétrie, sont toutes des habiletés qui doivent d’abord être acquises par les activités motrices. Et les concepts de sciences aussi (vitesse, masse, direction pression, etc.).

Bref « le recours aux expériences psychomotrices, forme la base de tous les apprentissages »1p.8.

Conclusion :

L’enfant se construit à travers les activités motrices et sensorielles.

Le développement consiste en une série progressive de transformations qui se produisent sous l’influence de la maturation et de l’expérience.  Chaque expérience ne s’ajoute pas seulement aux précédentes, elle les modifie.

Ces apprentissages vont dépendre des occasions qui sont fournies à l’enfant.

Malheureusement, les enfants manquent d’activités physiques 4, p. 486»». Pourtant, «les données récentes sur l’état de la santé mentale des enfants justifient de mettre l’accent sur un contexte d’activités où l’enfant peut bouger librement (Marie Claude Cloutier) 2A, p.175»». «Se mouvoir dans l’espace, … c’est se rendre disponible à être et à apprendre». «Comme l’enfant apprend plus facilement par l’expérience vécue concrètement,  le jeu, les séances de psychomotricité… les aident à mieux gérer leurs émotions et contribuent à les rendre plus disponibles pour effectuer les apprentissages scolaires. Elles peuvent contribuer à la qualité de la présence, de l’attention et de la concentration de l’enfant 2A, p.170C’est une intervention éducative qui permet de réduire progressivement l’importance des indices comportementaux, notamment chez les enfants qui vivent de l’anxiété, qui ont tendance à bouger et à être impulsifs ou lunatiques ou qui ont de la difficulté à s’adapter à un milieu perçu comme insécurisant 2A, p.170».

Les temps de psychomotricité sont des moments qui amènent à la connaissance de soi, celle du monde physique autour de soi et celle des autres.

Elles devraient être sources de plaisir et pousser à l’action.

Mais l’éveil sonore, les arts plastiques, la construction, les jeux symboliques contribuent aussi au développement psychomoteur.

Toutes ces expériences initient les enfants à des notions, concepts et connaissances qui vont être stables, car construits dans l’action et intégrés dans le vécu

Mais une heure par semaine d’éducation physique plus les récréations ne peuvent suffire pour que les enfants aient le temps de développer tous ces aspects de la psychomotricité. L’éducatrice et l’enseignante doivent donc planifier dans l’environnement des possibilités de jeux libres psychomoteurs et aussi prévoir à l’horaire des temps de jeu s’adressant plus spécifiquement à certains éléments psychomoteurs.

À nous donc de prioriser l’expression motrice des enfants, le plus souvent possible.

Toutes les activités suggérées dans ce texte vont rendre les enfants plus agiles, plus endurants. Elles vont aider à contrer l’obésité, augmenter leur capacité pulmonaire et cardiovasculaire, améliorer leur coordination et leur force, les rendant moins susceptibles de subir des blessures. Les enfants vont développer de la dextérité, de la rapidité et des capacités nécessaires dans la vie de tous les jours et dans leur parcours scolaire.

À vous de choisir celles qui vous plaisent et peuvent convenir à votre groupe ou à certains enfants.

Références

1.      April J. et Charron A. (2013) : La psychomotricité au préscolaire, Des activités nécessaires pour soutenir le développement global de l’enfant, Chenelière .

2.      Monzée J. :

A.      Soutenir le développement affectif de l’enfant, CARD, 2014 ;

B.      J’ai juste besoin de votre attention : Aider l’enfant et l’adolescent aux prises avec l’anxiété et le stress, Le dauphin blanc 2016;

C.      J’ai juste besoin d’être compris : Comprendre les comportements dérangeants chez l’enfant et l’adolescent Le Dauphin Blanc, 2014; .

D.     Et si on les laissait vivre : Accompagner avec bienveillance les enfants et les adolescents. Le Dauphin Blanc, 2018.

3.     House, R. (2011) Too Much too soon? Early learning and the erosion of childhoodHawthorn Press, Early Learning Series.

4.      Proulx C. (2015)l. Plaidoyer pour une enfance heureuse. Éditions du Cram

        Notes

1.      Les vidéos suggérées montrent des enfants un peu plus âgés, mais beaucoup des activités proposées peuvent s’appliquer aussi aux plus jeunes. À vous de choisir ce qui est adapté pour votre groupe. Certaines ont déjà été mentionnées dans l’article sur l’expression corporelle.

2.      Certains passages du texte ont été repris du texte publié en sur les besoins des enfants. Et des photos ont été pris dans des textes précédents 

3.      Les âges donnés par rapport à certaines habiletés ne sont pas des absolus et ne doivent pas être utilisés comme un test mais à vous donner une idée.

       Pour voir l'article en entier:https://jeulibrequebec.blogspot.com/2025/04/stimuler-le-developpement-psychomoteur.html

         Pour imprimer le document PDF:https://drive.google.com/file/d/1VnkATQcjl6zKfTk6vUve0NcsHpZJVUrB/view?usp=sharing

    

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