Par Anne Gillain Mauffette
Les enfants sont des créateurs nés. Ils observent le monde, se posent des questions, inventent des théories, des mots et représentent leurs idées à travers différents médias. C’est ainsi qu’ils construisent leur compréhension de tout ce qu’il y a dans leur environnement.
Mais certaines conditions sont nécessaires tant dans le milieu intérieur (locaux des services de garde ou de l’école) qu’à l’extérieur, pour favoriser le développement optimal de ces compétences chez l’enfant. Certaines attitudes de la part des adultes, certains matériaux, activités et environnements favorisent davantage la créativité que d’autres.
La créativité c’est la pensée divergente, alternative. C’est l’idée à laquelle on ne s’attendait pas, la réponse qui surprend. C’est donc la différence, la diversité qui doit être accueillie, encouragée, valorisée.
Comment maximiser le
développement du potentiel créateur de l’enfant ? Quelles sont les
conditions nécessaires à l’exercice de sa créativité ?
Les facteurs suivants vont influencer énormément la latitude des enfants et leurs initiatives.
- Les attitudes et interventions de l’adulte :
Un adulte qui :
- Permet d’utiliser le matériel de façon inattendue.
- A la capacité de créer des situations provoquant des questionnements, de l’émotion, de l’émerveillement qui vont stimuler la recherche, la résolution de problème,
- Pose des questions ouvertes au lieu de chercher «la bonne réponse»,
- Sait organiser les contextes favorables,
- Partage le pouvoir de décision et de planification avec les enfants,
- Installe un lien, un climat de confiance (il faut se sentir en sécurité pour créer),
- Va soutenir les enfants dans leurs tentatives créatives.
- Accepte les essais et les erreurs
- Le matériel :
Il doit être ouvert, complexe (c’est à dire qui permet une multitude de gestes, scénarios, comportements), sur lequel on peut agir (sur lequel on laisse une empreinte), en quantité (on ne peut rien faire avec quelques blocs) et variété suffisante (incluant le plus possible d’éléments naturels) et qu’on peut combiner.
3. Les activités, expériences, situations construites en fonction des intérêts, questionnements, théories intuitives des enfants et de ce qui se passe dans l’environnement vont soutenir les enfants dans leurs découvertes et expression.
4. Des périodes de temps suffisamment longues pour que les enfants aient le temps de s’investir vraiment.
Quelques
idées
Voici quelques exemples d’expériences qui peuvent facilement se présenter à cette époque de l’année, alliant la nature et l’exploration de différents médiums et habiletés. On va en profiter pour faire des activités dehors mais aussi rentrer des éléments de l’extérieur à l’intérieur.
1. Les
incontournables (?) pommes !
Les enfants peuvent vivre des expériences très différentes selon la façon dont ce sujet va être abordé.
Dans une maternelle A : on donne des feuilles polycopiées de pommes ou de pommiers à colorier aux enfants.
Dans une garderie B : des pommes sont sur la table dans un panier : les enfants vont faire de la compote de pommes.
Dans la maternelle C : différentes variétés de pommes ont été apportées et sont cachées sous un linge. L’enseignante de demande aux enfants de lui décrire une pomme. La plupart des enfants vont décrire une pomme rouge. Puis l’adulte va demander s’il y en a d’autres couleurs. On dégustera des morceaux de l’une et de l’autre et commentera les différences et celles qu’on préfère. On fera aussi des étampes.
Dans le CPE D, on est allé dans un verger et on a cueilli des pommes. On va les manger évidemment mais aussi les cuire et en rapporter un petit pot à la maison.
Dans le centre préscolaire incluant une maternelle E : deux pommiers vivent dans la cour. Les enfants ont donc l’occasion de voir les pommiers en fleurs, observer les pétales, branches, feuilles, s’asseoir à l’ombre, constater les insectes gravitant autour, la croissance/mesure, les soins à apporter au pommier, récolter, dessiner créer des poèmes, etc.
Quel environnement va favoriser davantage la découverte, va stimuler les sens, les connaissances et la créativité?
Mais il n’a pas que les pommes à aborder.
2.
Les
tournesols
Les tournesols sont omniprésents dans les jardins et les marchés en ce moment. C’est l’occasion d’en apporter et de proposer aux enfants intéressés à les observer et les représenter. Cela donnera des résultats très différents selon le regard, les expériences et les capacités de chaque enfant. On en profitera pour exposer les enfants à des œuvres d’artistes ayant eux aussi observé ces fleurs.
Dessins et peintures à la gouache ou à l’aquarelle
Œuvres en
trois dimensions : glaise, fil de fer et objets polyvalents (perles,
plumes)
3. Les
courges
Elles ont toutes sortes de formes parfois étranges et des couleurs variées.
Elles ont des graines aussi :
Photos Peachtree
On peut même les rôtir pour en faire une collation.
Les citrouilles se prêtent à toutes sortes d’utilisations :
On peut comparer les grandeurs, les soupeser et décider lesquelles sont les plus lourdes puis vérifier nos hypothèses avec une balance. Explorer leurs caractéristiques (textures, pépins) et ce qu’on peut faire avec.

Elles peuvent servir de surfaces pour faire des insertions et utiliser certains outils :

On peut les peindre avec différents outils (pinceaux, feutres spéciaux, bouteilles), faire des étampes dessus.

4. Les blés d’inde ou maïs
Ils sont aussi en saison et peuvent faire l’objet d’un intérêt pour les enfants.

5. Les arbres
Rien ne vaut une promenade dans un parc ou la forêt pour découvrir des choses. Mais si vous n’avez pas un seul arbre sur la cour (ce qui est bien dommage et vous pourriez penser à proposer d’en planter), il y en a surement dans votre quartier que vous pourrez surveiller.
À la suite de leurs observations, ces enfants ont créé ces collages tous différents, du plus simple au plus complexe, à l’image de leurs auteurs:
Ils ont également fait des sculptures en glaise :
Les feuilles
Dès qu’elles s’accumulent, les enfants exultent!
Ces enfants ont
choisi une feuille et l’ont associée à un petit morceau de carton de la même
couleur, puis ils ont cherché dans cette galerie d’art (mais cela pourrait être
dans votre local ou en classe avec des reproductions de peintures même prises
dans des calendriers), des peintures dans lesquelles l’artiste avait utilisé
cette couleur.
On pourrait aussi les classer par couleurs ou essayer de différencier les différents tons de vert, ou encore les classer par formes pour essayer de les identifier (ovales, oblongues, plus arrondies, dentelées pointues et arrondies, etc.). Photos et texte tirés de l’article Les mathématiques dans le jeu quatrième partie
Elles peuvent donner
lieu à de multiples formes d’expression plastique : des frottis, des
impressions, des traçages, des peintures
à l’aquarelle, à la gouache, des collages, des sculptures, et même la confection de personnages, etc.
Peinture de
groupe :
Ici les adultes ont documenté le processus de ce collage collectif :
Ci-dessous : Collage : les enfants ont chacun fait une feuille qui a ensuite été collée dans l’arbre.
![]() |
Traçages Photos Garden Gate Sculptures |
On peut les transportes et même les écraser pour en faire de petits morceaux ou des poudres pour ensuite faire des collages.
S’il n’y a pas d’arbres dans l’environnement de votre milieu éducatif, vous pouvez vous-même apporter de la végétation rapportée de vos propres promenades ou demander aux enfants d’en apporter de chez eux ou d’en récolter lors de leurs randonnées avec leurs parents.
Les fruits et les graines
Les glands, les noix sont des objets que les enfants aiment collectionner et utiliser dans leurs créations. Les cocottes tombées aussi.
La manipulation de ceux-ci va favoriser la motricité fine.
Ils pourront aussi être utilisés dans le coin maison pour faire la cuisine, dans les jeux mathématiques (dénombrements, alignements, classements, alternances) où en conjonction avec d’autres objets polyvalents et bien sûr à l’extérieur.

Ils peuvent aussi servir d’objets à faire glisser sur des rampes.
6. Les insectes et autres (gastéropodes, arachnides, coléoptères, etc.)
Il y a aussi bien sûr toutes les «bibittes» que les
enfants vont trouver : vers de terre, araignées, fourmis, etc. qui peuvent
toutes donner lieu à une étude plus ou moins approfondie dans des projets et être
accompagnée de lectures de documentaires et autres histoires. Ils adorent
retenir les noms compliqués et les répéter pour impressionner les adultes.
Voir le projet sur les araignées pour avoir des idées d’explorations possibles : Promouvoir le jeu libre au Québec: Un curriculum émergent, cela a l’air de quoi? Un exemple
Au
cours d’une promenade les enfants ont été à la recherche de petites bêtes (
qu’ils ont ensuite relâchées). Ils ont cherché à les identifier, les dessiner
et même dans certains cas, leur créer un habitat.
Ces enfants ont fabriqué des parcours pour les petits escargots et d’autres, un terrarium.
7. Les champignons
Ayant trouvé des champignons, les enfants les ont dessinés puis ont tenté de les identifier et les ont représentés en pâte à modeler.
Mais on pourrait très bien aussi en apporter en classe pour que les enfants puissent en observer (pied, lamelles, etc.).
8. Les oiseaux
Il peut arriver aussi que les enfants trouvent un nid tombé
ou un oiseau mort qui donneront lieu à toutes sortes de questionnements et
parfois de recherches et représentations.
9. Les écureuils
Ils sont partout! Les enfants peuvent donc les
observer.
Et les représenter.
Conclusion
Le dessin d’observation et autres formes de représentation aident les enfants à comprendre le vivant et les objets. Ils leur permettent de mieux voir, de regarder et remarquer les détails des êtres et des choses (formes, textures, couleurs, assemblages), d'affiner leurs perceptions.
Nommer les choses, les
parties qui les composent enrichit leur vocabulaire et leurs tentatives d’écriture.
Les enfants
développent ainsi une appréciation de la nature et vont avoir tendance à la
respecter davantage. Cela soutient leur curiosité tout en stimule leur sens
esthétique.
Mais les sujets d'étude pourraient aussi être des objets de tous les jour: une bicyclette par exemple, ce qui aidera à en décrypter le fonctionnement.
Vous
n’en croyez pas vos enfants capables? Essayez (mais pas juste une fois!) et ils vous
surprendront.
Profitons
de toutes les occasions que nous apporte la saison pour sensibiliser les
enfants à la beauté du monde tout en augmentant leurs habiletés de tous ordres : expression plastique, motrice, langagière et autres.
C’est certain qu’une cour naturalisée va permettre davantage de découvertes et donc de créations. Mais même dans un milieu très urbain et dans une école avec une cour asphaltée, il y a moyen de stimuler les connaissances et les représentations des enfants, pour leur plus grand bonheur et le nôtre.
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