lundi 9 octobre 2023

Les Mathématiques dans le jeu: Deuxième partie

 

Quels sont les principaux concepts en construction chez les enfants au préscolaire ?

 Pour voir la partie précédente, Le rôle de l'adulte, voir: https://jeulibrequebec.blogspot.com/

  Les enfants ont mesuré les tissus pour habiller leur schéma corporel.

                             

La liste qui suit a pour but de nommer des concepts explorés par les enfants et leur progression par rapport à ces notions, afin de pouvoir les identifier dans leurs jeux. Il ne s’agit pas d’en faire des sujets d’étude systématique, d’isoler les mathématiques  dans des périodes réservées à des leçons formelles ou d’élaborer une série d’activités dirigées.  Il ne s’agit pas non plus d’en faire une liste de choses à faire réaliser, absolument, par tous les enfantsmais d’une tentative d’aider l’adulte à connaître les différents niveaux de compréhension de concepts mathématiques, afin de pouvoir les reconnaître dans les jeux et activités spontanées des enfants  et le contexte global de l’enfant et de la classe ; d’identifier où en est chacun (et donc où est sa zone de développement proximal) et quel matériel, jeux, expériences ou commentaires et interactions prévoir pour le soutenir dans le passage à la prochaine étape. Elle devrait permettre à l’éducatrice ou l’enseignante de réfléchir sur sa pratique, sur l’organisation de son local ou sa classe et le matériel : favorisent-t-ils le développement de ces concepts, comment le favoriser davantage, comment aider tel enfant ?).

Le curriculum du préscolaire est intégré : tous les domaines y ont une importance capitale dans le développement et plusieurs domaines sont touchés dans une même activité. La construction par exemple amène des possibilités multiples d’apprentissages. Mais nous nous attardons aujourd’hui aux aspects mathématiques abordés dans ces jeux.

Pour une vision plus large des apports de la construction voir :

La construction et l’apprentissage: https://jeulibrequebec.blogspot.com/2019/04/la-construction-et-lapprentissage.html


Les principaux concepts qui vont se développer au préscolaire sont ceux associés :

-           aux nombres : appariement, correspondance terme à terme (un à un), les ensembles (ou collections) et leur quantités, la classification, la sériation, les nombres naturels, leurs noms (chiffres) et représentations symboliques, le sens du nombre (conservation du nombre), le système décimal (base 10),  les opérations et les relations.

-          et à la géométrie : figures planes et solides et leurs caractéristiques (attributs et propriétés), à la pensée spatiale ainsi qu’à la mesure (évaluer une longueur, une aire, un volume une masse, une durée) comprendre et utiliser des unités de mesures non conventionnelles et conventionnelles).

La progression des enfants dans l’acquisition de ces concepts se fait en plusieurs étapes et chacun évolue à son rythme. On devra donc accompagner chaque enfant dans son cheminement, en l’étayant selon sa zone proximale de développement.

La mention des âges dans ce texte n’est pas faite pour créer des attentes de performance chez les enfants («Oh ! Il est en retard sur ceci ou cela») ou considérer ceci comme une norme. Il ne s’agit que d’une indication de compétences possibles, fournies afin qu’on puisse les remarquer à un moment ou un autre dans la trajectoire du développement mathématique de l’enfant.


LE SENS DU NOMBRE

En général, les enfants sont intéressés par les chiffres/ les nombres et les quantités.

Photo Anne Mauffette
S. a dessiné des fleurs. Elle me fait remarquer qu’il y a une fleur avec un pétale, une avec deux, trois quatre, etc.


Un enfant pourrait : expérimenter des jeux de dénombrement, d’association, de classement, de logique.1

L’enfant pourrait reconnaître de petites quantités.1

Il pourrait : «utiliser différents objets, matériaux et instruments ou utiliser les technologies

(TIC) pour comparer, classer, compter»1.


Les nombres sont un mode fondamental pour représenter le monde. Les nombres sont des abstractions qui s’appliquent à toutes sortes de situations : cinq enfants, cinq sur un dé, cinq doigts, cinq ans, etc.2 Le chiffre, représentant le nombre, est une abstraction de la notion de quantité.

La croissance marquée de la compréhension numérique entre 2 et 6 ans est stimulée par l’apprentissage d’outils culturels (le nom des chiffres) et des méthodes comme compter et apparier.2

 

  1. L’appariement et la correspondance terme à terme (ou un à un)

L’appariement est un des premiers concepts mathématiques développé qui forme le fondement du développement de la pensée logique.

Typiquement les enfants entre 2 et 4 ans développent la compréhension de ceci à travers des relations de plus-moins-égal3.

C’est un pré requis pour compter et à la compréhension de la notion d’équivalence et du concept de conservation du nombre3.

                                                                    Z. a placé une figurine derrière chaque fenêtre.    Photo Anne Mauffette

 

La correspondance terme à terme (ou un à un) est la composante fondamentale du concept de nombre3.

C’est compter des objets en faisant les correspondances spatiales connectant un mot (le chiffre) à un objet dans l’espace.2

C’est aussi comprendre qu’un groupe a la même quantité d’éléments qu’un autre.

 Dans la correspondance terme à terme, l’enfant va pointer un objet tout en nommant le mot du nombre.  «… Un seul mot nombre peut être assigné à l’objet compté»1b.

Au début,  certains pointeront dans le vide entre deux objets, ou sauteront des objets ou compteront deux fois le même objet, pointeront sans dire le chiffre ou diront plusieurs mots pour un objet.

C’est l’expérience qui va améliorer la justesse.

C’est les comparaisons d’ensembles qui vont favoriser l’acquisition du concept de nombre et la pensée numérique.

Les enfants vont comparer deux collections d’objets en les pairant.

 Ils vont 3 :

       · Pairer des items qui ne sont pas semblables. L'enfant:

-          Paire des items différents mais reliés qui ne sont pas semblables

-          Paire des ensembles  égaux avec 5 items ou moins

-          Paire des ensembles inégaux avec 5 items ou plus

-          Utilise le vocabulaire approprié en pairant des ensembles (ex.: trop, pas assez)


· Pairer des items semblables. L'enfant paire:

-          Paire deux items semblables

-          Paire des ensembles égaux- avec 5 items ou moins

-          Paire des ensembles inégaux- avec 5 items ou plus

-          Utilise le vocabulaire approprié pendant qu’il paire des ensembles qui sont semblables (ex.: trop, pas assez)

 

Une fois que les enfants ont compris la correspondance terme à terme, ils peuvent l’appliquer dans des activités de plus haut niveau qui implique les notions d’équivalence et de plus ou moins3.

L’utilisation chez les enfants de « pas assez» ou de « trop» est un indice de leur bonne compréhension de l’appariement (pairer) et de la correspondance terme à terme.

 

  1. La cardinalité et la quantité

Les enfants vont explorer  la cardinalité c’est-à dire, mettre un chiffre (un nombre) sur la quantité d’objets dans un ensemble.

Ils vont :

-          Concevoir une quantité par perception immédiate (de 1 à 3 ans)

-          Déterminer une quantité par subitisation par acquisition (voir  plus bas)

-          Connaître les mots représentant les nombres (chiffres), en savoir la séquence

-          S’exercer à la correspondance terme à terme

-          Commencer à écrire les symboles numériques

-          Comparer des ensembles par rapport à la quantité

 Du matériel pour comparer des ensembles (quantifier).   Photo Garden Gate


-          Coordonner ces différentes compétences

-          Parler de nombres entre eux et avec l’adulte

 

Photo Anne Mauffette
S. explique qu’elle a fait trois personnages mais une à la varicelle, deux ballons, une fleur et un cerf-volant.

 

  1. Classification : Créer des ensembles ou des collections

« L’enfant pourrait : trier, ranger, classifier et comparer des objets (ex.: selon la grandeur, leur couleur et leur forme».1

 

 
Un enfant a classé spontanément toutes ces billes par couleur. Photo Anne Mauffette

 

L’enfant pourrait : « Former des collections réelles (ex. : regrouper des autos rouges)»1

 

 Cet enfant a choisi dans un bac d’objets et inclus dans sa collection uniquement les chaussures excluant tout le reste. Voir : Sélectionner, classifier, aligner, ordonner  https://youtu.be/oW7QofzGTJA

 

Il y a classification quand deux ou trois éléments sont considérés comme équivalents (semblables). Mais on peut considérer des objets ou un groupe d’objets comme équivalents pour différentes raisons.3

 

 

À gauche : Les enfants ont classé selon le critère des matériaux: roche pas roche. Photo© Nathalie Bouchard
À droite : Les enfants vont classer par couleur. Photo Garden Gate

Cela amène aussi à reconnaître qu’un groupe d’objets fait partie d’un plus grand groupe.

Un enfant peut démontrer par son comportement qu’il a une connaissance de classification par association ou par fonction  (ex. : ranger tout ce qui sert à écrire) et une certaine compréhension de l’inclusion dans une classe (ex.: une banane et une pomme sont toutes les deux des fruits).

Quand un enfant démontre par son comportement qu’il a compris un concept (il a mis de la nourriture et que de la nourriture dans le panier à pique nique par exemple), on peut en profiter pour demander à l’enfant de commenter ses actions. La discussion va nous assurer qu’il ou elle a effectivement compris. L’utilisation du langage dans une activité partagée permet à l’enfant  de construire du sens et de démontrer un plus haut niveau de compréhension d’un concept 3.

La plupart des enfants sont capables de classer des objets. Cependant ils peuvent ne pas savoir les noms des formes ou des matériaux. Ce manque de vocabulaire peut être interprété comme une incapacité de classer selon un attribut. À nous de leur donner les mots.

Lorsque que les enfants sont capables de classer selon deux attributs, ils ont acquis le vocabulaire pour décrire les caractéristiques spécifiques des objets. Il est alors approprié de leur demander par exemple, dans des jeux de devinettes par exemple, de trouver quelque chose de rouge et long. Lors de la distribution de quelque chose, je peux demander que se lèvent d’abord les garçons qui portent du jaune ou les enfants qui portent des souliers de course et du bleu 3.

On peut même aller jusqu’à trois attributs : je vois quelque chose de petit, rond et bleu.

Il n’est pas typique pour des enfants du préscolaire de bien comprendre les concepts d’inclusion et d’exclusion. On peut cependant, en leur posant des questions spécifiques leur permettre de démontrer leur connaissances partielle 3. « Je vois que tu as utilisé que du rose et du mauve dans ta peinture» « Oui, c’est mes couleurs préférées» (Elle a donc exclu les autres).

Les graphiques sont une forme plus complexe de classification. La confection de tableaux en colonnes sont appropriés pour les enfants au préscolaire et permettent aux enfants de travailler ensemble et d’apprendre les uns des autres. Les graphiques qui démontrent clairement une information donnent l’occasion aux enfants de créer et comparer des ensembles 3.

Un graphique peut naître du désir des enfants de partager une information, de quantifier des résultats et comparer les résultats. Ils peuvent être très stimulants pour certains enfants cognitivement avancés car ils provoquent un haut niveau de pensée (Moonmaw et Hieronymus, 1995)3.

Nathan a fait un sondage et un graphique: «Qui Préfère le Pepsi, le Perrier, le Coca Cola ou les Yops?»

La météo a été ici l’occasion d’une représentation graphique :

La météo sur tout un mois. Photo Danielle Jasmin


On va observer si l’enfant 3 :

-          Est capable de regrouper des objets identiques

-          Trie les objets selon un attribut (couleur, forme, grandeur, matériau, motif, texture, usage).

 Collage : Du plus petit au plus grand.
On pourrait même dénombrer les petits carreaux. Photo Thinking with materials , Setting the table: collages ILT

-          Classe selon deux attributs

-          Classe par trois attributs

-          Décrit ce qu’il a fait pendant qu’il classait selon 1,2,3 attributs

-          Explique ce qu’il a fait pendant qu’il classait selon 1,2,3, attributs

-          Classe selon les fonctions

-          Puis décrit ou explique ce qu’il a fait

-          Classe par association

-          Puis décrit et /ou explique ce qui a été fait

-          Comprend l’exclusion d’une classe

-          Comprend l’inclusion dans une classe

-          Classe par nombre

 

  1. Sérier et ordonner 

Les enfants vont souvent sérier spontanément des objets du plus petit au plus grand.

La double sériation. L’histoire de Boucle d’Or est souvent utilisée pour illustrer la double sériation : Le gros lit ou la grosse chaise ou le gros bol va avec les gros ours.

En comparant des objets les enfants sont amenés à identifier différents attributs ; une tour peut être faite d’un même nombre de blocs mais une des tours peut être plus haute que l’autre.

Ordonner correspond à un plus haut niveau de comparaison (voir des différences) et implique la comparaison de plus de deux objets ou de plus de deux ensembles3.

 

Photo Anne Mauffette
Ce jeu amène les jeunes enfants à classer du plus petit au plus grand et par couleur.

 

Ordonner et sérier impliquent de placer plus de deux objets ou ensembles dans une séquence. Ordonner implique de les placer dans une séquence du premier au dernier.

C’est un pré requis aux séquences et motifs3.

Ordonner est le fondement de notre système numérique (ex. : 2 est plus grand que 1, 3 que 2, etc.).

Lorsqu’on  demande aux enfants de se ranger en ordre de grandeur ou on leur propose de sérier des sons du plus fort au plus faible ou de créer et classer des couleurs du plus pâle au plus foncé, ils travaillent ces concepts.

  Photo Garden Gate

Les enfants savent très tôt ce que signifie être le premier et être dernier. Ils vont facilement transférer leur connaissance des nombres : deux-ième, trois-ième...

On va observer si l’enfant 3:

-          Compare des opposés (ex. : long, court, petit grand, etc.)

-          Ordonne 3 objets au hasard

-          Ordonne 3 objets par essai et erreur

-          Ordonne de façon systématique

-          Série à l’envers

-          Fait une double sériation

-          Décrit ce qui a été fait

-          Explique ce qui a été fait

Dans leurs jeux les enfants vont spontanément classer des objets par couleur, taille, texture, forme, fonction, etc.


Les enfants entre eux sont des modèles les uns pour les autres ; un enfant peut en guider un autre moins compétent lors d’une activité partagée. Les activités partagées forcent les enfants à clarifier et élaborer leur pensée.

Lorsque les enseignantes utilisent le langage mathématique dans leurs interactions avec les enfants cela soutient la progression des enfants. Cela les rend aussi plus conscients des aspects mathématiques inclus dans leurs activités et dans la classe.

L’observation et la documentation des actions et dires des enfants va permettre d’évaluer les progrès de ceux-ci. Lorsqu’on partage la documentation avec les enfants, cela les rend aussi plus conscients de leurs apprentissages.

Quand les enseignantes savent quels concepts mathématiques les enfants peuvent acquérir et les stades pour y parvenir, elles peuvent planifier des expériences et situations signifiantes et des interventions pertinentes en tenant compte des intérêts des enfants et leur stade de développement.


  1. Dénombrer

 

 Combien de blocs vont tomber ? Photo Garden Gate

« L’enfant pourrait :

-          Découvrir les nombres (que le chiffre 4 correspond à son âge)

-          Dénombrer des objets mais pas nécessairement dans le bon ordre

-          Dénombrer des collections coordonnant un geste et le nombre correspondant

-          Utiliser les nombres (compter le nombre de blocs qu’il a utilisé pour sa construction).»1

-          Avancer un pion sur un jeu après avoir jeté le dé.

-            « Expérimenter des jeux de dénombrement, d’association, de classement et de logiques» 1

-          «Dénombrer des collections coordonnant un geste et le nombre correspondant»1

 

Les enfants vont découvrir «Le principe cardinal» c’est-à dire que « le dernier nombre employé dans une séquence de comptage représente le nombre d’éléments de l’ensemble compté» 1b

 

-          Compter et le principe de cardinalité :

L’enfant pourrait : « reconnaître de petites quantités»1

     ·          La comptine ou suite ou séquence des chiffres :

«L’enfant pourrait : Réciter une comptine de nombres sans nécessairement faire le lien avec les nombres réels.1

La plupart des enfants sont exposés assez tôt aux mots qui représentent les nombres (les chiffres). Ils apprennent leur séquence par imitation et retiennent assez facilement cet enchaînement même si au début, ils en oublient quelques-uns uns, s’arrêtent à un certain nombre ou répètent plusieurs fois le même ou ne les récitent pas tout-à-fait dans l’ordre.

Au début, ils ne reconnaissent pas leur relation avec les quantités.

Le sens du nombre est construit par chaque enfant progressivement, à travers la création de relations de toutes sortes avec des objets7.

Il faut que les enfants vivent des expériences qui leur permettent de faire le lien entre le mot, les nombres et les quantités.4

« Pour l’enfant préopératoire, réciter la suite des nombres n’est pas (automatiquement) perçue comme un outil servant à compter des objets2


     ·          Compter

Compter c’est pairer un chiffre avec un objet (correspondance terme à terme). Le dernier nombre a un statut spécial : il représente la quantité de tous les objets de l’ensemble : c’est la cardinalité. 2

 Des enfants peuvent compter une série d’objets sans en savoir la quantité finale.

Un enfant qui compte six objets mais quand on lui demande combien il y en a, recompte, ou indique le sixième, montre qu’il ne comprend pas la cardinalité3.

Pour lui les nombres sont des éléments individuels d’une série et ne représentent pas une quantité. Pour quantifier des objets comme un groupe, l’enfant doit établir une inclusion hiérarchique : un est inclus dans 2, qui est inclus dans 3 etc. (Kami)

 

 Tiré de Kamii 7

 

Il est plus facile de compter des objets sur une ligne que des objets épars ou en cercle.



 

Nous avons vu que certains enfants ne vont pas coordonner l’énoncé du chiffre et le pointage ou vont sauter des éléments ou en dédoubler.

Piaget avait démontré que les enfants n’avaient pas l’idée de conservation du nombre  (pas avant 7 ans et demi) parce que lorsque deux ensembles comportant le même nombre d’objets étaient placés différemment (un sur une ligne plus longue que l’autre), malgré le fait de les avoir compté, se fiant seulement à leur perception, ils disaient qu’il y en avait plus dans la longue ligne.

Mais des recherches plus récentes ont montré que si les enfants peuvent manipuler des objets concrets, ils peuvent réussir à les pairer et à établir l’équivalence (« C’est pareil»).2

 Ils vont d’ailleurs aussi d’eux-mêmes constituer des ensembles équivalents.

Il est plus facile pour un enfant de dénombrer des objets concrets que des images. Aussi faut-il laisser aux enfants de multiples occasions de manipuler des objets avant de passer à plus d’abstraction. Les enfants pourront organiser dans l’espace les objets et le compter.

Compter  de grands ensembles demande de l’attention : l’enfant doit coordonner son action (pointer) et l’expression des nombres, se rappeler où il en était dans l’espace et dans la suite des nombres.

Les enfants de 2-3 ans peuvent compter de petites quantités (1 à 3 objets).2 Ils peuvent aussi montrer avec leurs doigts des petites quantités. Ils en viennent à généraliser le concept de 2 à savoir que 2 peut représenter différentes choses (2 biscuits, 2 chiens, etc.).2

A quatre ans ils étendent leur compréhension à des groupes plus grands.

À cinq ans, ils vont souvent intégrer les aspects du nombre jusqu’à dix et pour certains, commencent avec les dizaines.Ils peuvent aussi compter des images. Mais les enfants doivent pouvoir agir sur ces images.


On a tendance à toujours faire compter les enfants de gauche à droite dans le sens de la lecture. Mais il faut que les enfants apprennent qu’on peut compter un ensemble d’objets de toutes sortes de façons (de droite à gauche, commencer dans le milieu) et que le résultat restera toujours le même (le même nombre cardinal).

Les enfants vont aussi apprendre à compter à l’envers dans leurs jeux : décollage d’une fusée, départ d’une course ou dans des chansons :

 Voici une anecdote rapportée par un enseignante de maternelle qui illustre une des mille façons d’aborder les mathématiques au préscolaire:

En attendant que tous les élèves viennent s'asseoir après s'être lavé les mains, je chante une chanson: Ils étaient 10 dans un lit...

À chaque fois qu'il y en a un qui tombe en bas du lit, je demande aux enfants combien il en reste en leur montrant mes doigts (et plusieurs le font aussi). 
À la fin, le dernier dit: Revenez, je suis tout seul! Là, on montre nos dix doigts et les enfants disent "10!" et je renchéris en disant: "Bien oui, les 10 sont revenus!" Un de mes élèves me dit: "Non, 9, il y en a 9 qui sont revenus parce qu'il y en avait déjà un dans le lit!"

 

     · Les relations de plus et de moins

L’enfant pourrait : « reconnaître différentes quantités et grandeurs : beaucoup, peu, autant, plus que, moins que»

« J’en ai pas beaucoup ! « Il en a plus que moi !», montre que l’enfant a déjà une connaissance des quantités.

Les enfants peuvent identifier le plus et le moins avant de posséder la connaissance de la conservation des nombres ou des quantités.

Les enfants de 2 et 3 ans utilisent leur perception (la subitisation) pour déterminer par exemple ce qui est plus long ou moins long ou peuvent parfois compter des objets en utilisant les mots des nombres (chiffres) à l’oral (moins de 4).2

Les 4 ans utilisent le comptage et des stratégies de pairage pour trouver ce qui est moins ou plus pour des nombres de moins ou égal à 10 mais se laissent encore berner par leurs perceptions. Un enfant pourrait compter deux séries de six objets mais quand même dire qu’il y en a plus dans un ensemble soit parce que les objets sont plus gros ou qu’ils prennent plus de place. Devant deux blocs de même longueur si les blocs ne sont pas alignés, ils peuvent dire que les deux sont plus longs.2

Les 5 ans comparent des situations avec des objets, ou en dessinent, et apparient ou comptent pour déterminer ce qui est plus ou moins.2

Compter deux ensembles pour déterminer où il y en a plus, ou moins, est difficile car cela demande à l’enfant de retenir le nombre cardinal (le total) du premier tout en comptant l’autre.

 De plus, quand il compare des ensembles d’objets différents, l’enfant ne doit pas se laisser influencer par la taille ou la nature des objets.4

 

     · La subitisation :

C’est reconnaître  globalement et de façon juste une quantité. L’enfant va d’abord évaluer à partir d’une perception visuelle ou auditive par exemple (subitisation perceptuelle).

Certains enfants vont avoir besoin de compter pour dénombrer le nombre de points sur un dé ou une carte à jouer, d’autres auront intégré le motif fait par les différents points ou symboles et pourront d’un coup dire : «5».  Ou avec deux dés, ils vont dire« je vois 2 et 3, je sais que ça fait 5».2

C’est une subitisation pas acquisition, due à la répétition. Il y a aussi la subitisation conceptuelle qui s’applique à de plus grands nombres.

     · Le dix et les dizaines, les groupes et les groupes de groupes

Certains enfants comprennent très vite qu’une fois qu’on connait les nombres de 1 à 10 ou 20, on peut facilement compter jusqu’à cent et même jusqu’à mille si on voulait, du moment qu’on connait le nom des dizaines (vingt, trente, etc.). Ils ont reconnu la répétition des nombres de 1 à 9 ajoutés à la dizaine.

Au début, pour l’enfant 10 c’est 10 uns. Ce n’est que plus tard que 10 va signifier 1 dizaine et zéro unités.

Le matériel Montessori est particulièrement bien fait pour aider à comprendre ces concepts.

Le matériel sera offert à un enfant qu’on sait prêt pour ce défi.

Certaines écoles célèbrent encore la centième journée d'école mais d'autres ont abandonné cette pratique.

     · Les symboles des nombres :

Les enfants ont besoin d’expériences reliant les symboles pour les quantités, à de vraies quantités (objets, dessins, etc.).

 

Ils en viendront à :

-           à reconnaître un certain nombre de chiffres (lire)

-          à représenter un certain nombre de chiffres (dessiner ou écrire).

Les enfants seront initiés à la représentation symbolique, écrite, de ces nombres/chiffres.

Ils savent souvent montrer, lire ou écrire le chiffre représentant leur âge.

Certains tracés sont plus faciles que d’autres : le 1, 3, 4, 5 et 7 sont réalisés plus tôt que le 6, 8 et 9. Certains vont inverser le 3 par exemple, car le concept de gauche droite n’est pas encore acquis.

« Pendant longtemps, l’accent a été mis sur le développement de la compétence de comptage ; or ces stratégies ne représentent pas la meilleure façon pour les enfants de résoudre des problèmes et se préparer aux opérations plus complexes (Cheny 2021). L’aspect central des mathématiques réside dans les relations partie-partie-tout.»5

 

  1. Les opérations :

L’enfant pourrait : «Résoudre des problèmes simples par une action : enlever (un de moins), ajouter, partager en utilisant des objets concrets» 1

-          Composer décomposer

Le développement de stratégies de composition et de décomposition basées sur les relations partie-partie-tout est à la base de l’addition et de la soustraction et plus tard de la multiplication et la division.

Les enfants composent et décomposent en géométrie lorsqu’ils construisent par exemple une maison avec un carré et un triangle et font différentes structures.

Ils peuvent aussi composer et décomposer des images de casse-têtes.

Ils peuvent composer des formes avec leurs corps.

Par rapport au nombre, décomposer c’est représenter un nombre de différentes façons. Composer c’est créer un nombre à partir de deux ou plusieurs nombres.4

Les enfants vont progressivement comprendre que deux oiseaux sur un fil plus trois qui arrivent c’est la même chose que trois oiseaux avec deux qui arrivent.2

Ils peuvent résoudre des problèmes simples («Il manque combien de camarades ce matin ?»).

Les enfants de 4-5 ans apprennent progressivement les parties pour 3, 4 et 5. Quels nombres se cachent dans un nombre ?

Les jeux à deux dés amènent les enfants à réfléchir à cette question.

Ils vont se rendre compte qu’on peut décomposer et recomposer des nombres en parties: que 5 peut être aussi bien 3+ 2 que 4+1.

C’est un pas vers la reconnaissance des propriétés de commutativité de l’addition qu’ils verront beaucoup plus tard (a+b=b+a).

 

 

        Ce jeu Ferme la Boîte existe aussi pour 4 joueurs en tons neutres ou en couleur. Photo Anne Mauffette

 

Certains  vont aussi peut-être comprendre qu’on peut composer dix 1 en un 10 et décomposer un 10 en dix uns.

 

-          L’addition et la soustraction

C’est dans la vie de tous les jours que les enfants vont être exposés aux additions et soustractions. Il y a un invité de plus pour souper ce soir à la maison, on va ajouter une assiette. « Il m’a pris 2 crayons !».

Compter c’est aussi additionner : 3 c’est 2+1, 4, c’est 3+1, etc. (ou soustraire si on compte à l’envers).2

L’addition et la soustraction sont des transformations. C’est ajouter ou enlever ou retirer. L’addition c’est un changement vers le plus et la soustraction, vers le moins.

Les enfants de deux, trois ans peuvent par exemple comprendre :

-           que 2 blocs plus 2 blocs  cela donne 4 blocs (changement vers le plus) et

-          que 4 pommes moins une pomme ça laisse 3 pommes (changement vers le moins).

Ils vont utiliser des termes comme : c’est moins que, c’est plus que.

Les enfants plus vieux vont à un moment donné aussi comprendre que le signe = veut dire : est le même nombre que, est égal à ou cela fait, est le total. Ou dans la soustraction = ce qui reste.

 Ils vont aussi progressivement comprendre que 6 c’est 5+1,  que 7 c’est 5+2, que 10 c’est 5+5.

Et plus tard que tous les nombres consécutifs (1, 2, 3) sont liés à l’opération +1.

Mais il faut qu’ils aient beaucoup d’expériences concrètes avant de passer aux problèmes décontextualisés.

 

·  L’addition :

Un jeu comme «Tumbling Towers» où les enfants essaient d’enlever des blocs où sont inscrits des chiffres (1,2 ou 3), sans faire tomber la structure, va inciter les enfants à trouver des stratégies pour additionner leurs gains en fin de partie. La plupart vont faire de traits pour chaque morceau  (deux traits pour un 2) gagné et  compteront le total.

 




Photo Anne Mauffette

 

En général :

Les 4 ans utilisent la subitisation et le comptage de la cardinalité jusqu’à 5. 2

Les  5 ans utilisent la cardinalité (comptage).2

 C’est plus facile pour eux avec des objets pour des groupes de 5 et moins, et avec les leurs doigts pour les groupes de 5 à 10.2

Les enfants utilisent différentes stratégies : pour additionner 4 + 2, ils pourront dire par exemple 4… 5, 6 (« J’en ai compté 2 de plus»).2

Jusqu’à l’âge de 6 ans les enfants doivent utiliser des actions (objets ou doigts).2

 

Ce matériel Montessori peut se retrouver dans les jeux de table à la disposition des enfants et pourrait convenir à certains enfants que ce concept intéresse.

 

Quand les enfants utilisent leurs doigts pour additionner, il faut les laisser faire.

Pour trouver la partie d’un total 5 + ? = 7 certains vont par exemple dire 5…6,7 («J’en ai ajouté 2»)

Plus tard, au niveau supérieur, ils pourront dire que 8+6 c’est la même chose que 10 +4 qui égale à 14

Mais les enfants doivent d’abord savoir :

-           quelles sont les parties des nombres de 3 à 9

-           quels sont les nombres partenaires pour faire 10 de chaque nombre

· La soustraction :

Les jeux de Kim ou on fait disparaître un ou objet, puis deux, initient les enfants à la soustraction.

Devant un problème de soustraction, les enfants vont replier les doigts pour les éléments enlevés.

-          Les fractions

Les enfants vont être confrontés aux fractions quand ils vont diviser la pâte à modeler ou la glaise en plusieurs morceaux, manger la moitié d’une pomme (ou faire des étampes avec des demi- pommes), partager des morceaux de gâteaux, une pizza, etc.

Ils vont rencontrer des demi-cercles, par exemple, dans leurs jeux.

Photos Garden Gate

 

6. Noter et établir des régularités

Une suite est un ensemble d’éléments arrangés dans un ordre déterminé.

L’enfant va remarquer des suites non numériques à motif répété dans son environnement, les fenêtres de l’école par exemple, ou les lignes dans un tableau.

 Acrylique sur toile Molinari, 1966

Ils vont en représenter en utilisant des objets (des perles, des petits personnages, par exemple), des sons, des mouvements (chorégraphies). On peut aussi en faire avec des couleurs, des formes, des objets de la nature.

 


Photos Anne Mauffette

Photo Garden Gate

Certains enfants plus vieux vont être capable de reconnaître quelques régularités numériques comme les chiffres pairs 2, 4, 6 ou 5

Pour voir la partie suivante, La géométrie et le mesure, voir: https://jeulibrequebec.blogspot.com/2023/10/les-mathematiques-dans-le-jeu-troisieme.html


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Les temps de regroupements au préscolaire

Par Anne Gillain Mauffette On pense souvent, quand on parle de regroupement, à la «causerie». Mais les occasions de regroupements sont b...