lundi 12 juin 2023

Observer les enfants au quotidien et dans le jeu pour évaluer leurs progrès, mais pas seulement… : Deuxième partie

Par Anne Gillain Mauffette (suite) 

Pour voir la première partie: https://jeulibrequebec.blogspot.com/2023/06/observer-les-enfants-au-quotidien-et_54.html

Pour voir l'article au complet :https://jeulibrequebec.blogspot.com/2023/06/observer-les-enfants-au-quotidien-et.html

Et qu’est-ce qu’on va observer dans le jeu?

Au départ les éducatrices ou enseignantes organisent l’environnement et planifient pour le jeu. Elles pensent à chaque aire dans leur local ou classe et identifient leurs intentions par rapport aux apprentissages possibles dans chaque aire (blocs, coin d’expression dramatique, expression artistique et graphique, livres, jeux de table, matériel de manipulation et objets mobiles, etc.). Ces apprentissages souhaités déterminent le matériel  et le type de soutien nécessaire. Tout ceci sera constamment réévalué.

Dans le coin bloc par exemple, on peut prévoir que les enfants vont sans doute (Gronlund, 2014 dans 1) :

-          identifier des formes, les comparer, se rendre compte que deux triangles peuvent faire un carré, deux carrés un rectangle etc.

-          sérier et classer les blocs selon leurs formes et leur taille

-          s’initier au concept de mesure ( blocs plus longs et plus courts) ainsi que la taille de leurs structures ou leurs routes

-          compter et comprendre progressivement le concept de quantité

-          découvrir la symétrie

-          explorer les notions de gravité, poids, équilibre et momentum

-          coopérer et communiquer les uns avec les autres en construisant ensemble

-          développer leur créativité alors qu’ils représentent le monde

Il s’agit alors de vérifier ce que chaque enfant explore et démontre.

Ci-dessous, l’enfant a fait des constructions explorant en plus des concepts d’équilibre et de formes, les notions de symétrie et d’asymétrie ainsi que d’alternance (couleurs des fenêtres dans la deuxième construction).

Pour avoir une idée plus complète des apprentissages possibles à observer dans le jeu de construction voir : La construction et l’apprentissage : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2019/04/la-construction-et-lapprentissage.html

Et la vidéo : Une histoire de coopération dans le coin blocs : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2020/01/histoire-dune-collaboration-dans-le.html

 

Souvent dans leurs jeux les enfants développent toutes sortes de concepts et d’habiletés en même temps.

-          Les concepts :

En observant, on va constater les concepts sur lesquels les enfants « travaillent».

Pour voir la liste des concepts qui peuvent être observés, consultez : https://jeulibrequebec.blogspot.com/p/concepts-que-lon-peut-aborder-dans-le.html

Exemples :

15 décembre. À la collation, alors que des enfants expriment ce qu’ils souhaitent pour Noël, N. (4ans) dit que son « souhait le plus cher est que les personnes les plus précieuses vivent à l’infini». Il spécifie que les personnes les plus précieuses sont la famille. (Concepts de finitude, de mort et d’éternité, importance de la famille, développement affectif).

Fin juin

G. (4 ans) trace des lignes «J’ai fait une grille», dit-il. Je lui précise qu’il a fait des lignes verticales parallèles, puis des lignes horizontales parallèles qui croisent les autres à angle droit.







Il reprendra ce schéma plusieurs fois. Comme je commente que les lignes sont plus nombreuses et plus rapprochées sur l’une de ses grilles, il répond : «C’est un moustiquaire».(Concepts et vocabulaire mathématiques).

-          Les compétences et habiletés dans tous les domaines:

Exemple :

Sophie (5 ans) assise près des blocs, se met à jouer avec. Elle me dit : « Regarde j’ai fait un K» Quelle bonne idée de faire des lettres avec les blocs. Si tu veux bien je vais prendre une photo. Et la voilà qui en construit plein d’autres.

(Encore une fois je remarque que l’attention que l’on donne à leur créations les encourage à poursuivre leurs explorations).

Nous regardons comment nous pouvons réaliser des courbes pour faire un J par exemple en utilisant les plus petits blocs. Je commente : «en fait, on peut faire des lettres avec toutes sortes d’objets» et je m’éloigne pour m’occuper d’un autre enfant.

Elle revient dix minutes plus tard : «Regarde j’ai fait un S pour Sophie. Elle avait pris des boules d’ouate qu’elle avait trouvées près de la table à  dessin/écriture. Elle s’attend à ce que je prenne une photo ce que je fais (connait le nom de certaines. lettres et les représente avec des matériaux originaux, autonomie). 

Pour voir ce qu’on pourrait observer dans différentes activités, voir :

Ce qu’un enfant apprend en faisant de la peinture : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2021/08/ce-quun-enfant-apprend-en-faisant-de-la.html et

Analyse d’une activité : le modelage : la pâte à modeler et le glaise : https://jeulibrequebec.blogspot.com/2021/08/analyse-des-activites-le-modelage-la.html

Le jeu  de l’enfant a toujours une raison d’être, un but dans sa pensée ou ses sentiments. Le défi est d’en deviner le sens et ensuite d’agir en conséquence.


En pratique, comment on fait?

 Les façons d’observer :

Les diverses techniques d’observations sont basées sur des valeurs  différentes et ont des buts différents. Certaines conviennent davantage en milieu éducatif préscolaire.

-          Prendre des notes express.

On va noter des moments qui nous touchent, significatifs, même magiques. Il s’agit de notes très brèves qui peuvent être prise sur un «post-it» ou dans un petit carnet et mis ensuite dans le dossier de l’élève. On note par exemple tout ce qui est une première pour l’enfant, un intérêt particulier ou une habileté, quelque chose d’inhabituel ou d’exceptionnel dans le jeu de l’enfant, quelque chose qui nous a surpris, égayé. Le but étant de tracer un portrait des intérêts de l’enfant et de son développement à partir de multiples bouts d’informations.

Une collègue avait choisi d'écrire le nom de l'enfant dans un cahier à spirale, gardé 4 pages pour chaque enfant, laisser le cahier dans un endroit central et y consigner quelques mots des observations signifiantes.

On pourra plus tard réfléchir et consigner le sens de ces observations.

Exemples:

S. (2ans) pleure, Z. lui apporte sa couverture :

(Elle démontre de l’empathie, identifie les besoins de l’autre, ses habitudes, ses moyens de consolation ainsi que les objets de l’autre et sait où les trouver).

G. se balance. Un coup de vent fait tourbillonner les feuilles. « On dirait des oiseaux», dit-il (motricité globale, comparaison, métaphore poétique).

Voyant les échasses (longues tiges en bois avec des bouts rouges), il dit : « on dirait des allumettes géantes (comparaison, métaphore, grandeur)Il tente de les enfourcher et réussit avec de l’aide (motricité globale, équilibre).

-          Les narrations (observation naturaliste, descriptive, assez libre)

L’approche narrative va mieux refléter l’apprentissage que des indicateurs de performance.

Il s’agit de plus longs narratifs écrits, souvent accompagnés de photos, où on essaie de décrire une tranche de vie dans un langage accessible. On y note pendant (ou après) une observation de plusieurs minutes, des détails sur le langage utilisé par l’enfant, avec qui  et avec quoi il ou elle jouait, etc.

On va tenter en fait, de rédiger un récit d’apprentissages («learning story»), élaboré à partir d’observations basées sur les intérêts de l’enfant, son niveau d’engagement, de communication, de persévérance, de responsabilisation. Cela est raconté comme une histoire, comme si l’observateur expliquait ce qu’il a vu. C’est parfois écrit à la première personne.

Souvent, en observant une seule activité (comme ici), on peut témoigner de plusieurs aspects du développement et des compétences en jeu.

Exemple :

PETITE HISTOIRE D’UNE CRÉATION*

 

 

Z. a une idée. Elle s’installe à la table de dessin/écriture. Elle dessine une tête et la découpe. Puis dessine des cheveux, les découpe et veut les coller sur la tête (je ne sais pas pourquoi elle n’a pas choisi de dessiner les cheveux en même temps que la tête). « J’ai trois choix dit-elle : brocher, utiliser le papier collant ou la colle». Elle décide de choisir le papier collant. Elle découpe une robe dans du papier doré (recyclé) puis un cou ou col dans du papier brillant d’une autre couleur (ambré). Elle dessine deux ronds et les découpe (ce sont des boucles d’oreilles). Elle découpe des manches mais demande de l’aide pour deux demi-cercles dans du papier brillant rouge. Pour m’expliquer ce qu’elle veut, elle nous demande de découper deux courbes et une ligne droite. Je lui propose de dessiner ce qu’elle veut pour que je comprenne bien. Elle dessine deux demi-cercles et me demande de les découper. Elle est satisfaite et à ma surprise les colle en haut des bras (pour représenter des manches bouffantes). Elle me demande un long bâton : «C’est une princesse marionnette». Je veux prendre une photo. «Attends, j’ai oublié de lui mettre une couronne» dit-elle. Elle revient : elle a dessiné, découpé et collé une parure. « C’est un hennin !» annonce-t-elle.

Elle décide de construire un château pour aller avec l’histoire.

Apprentissages notés après analyse:

Compétence 1

Motricité fine : elle sait découper

Elle réussit très bien l’assemblage des morceaux.

Elle est précise

Compétence 2

Zoé a une pensée indépendante

Elle est autonome

Évalue ses options et fait des choix

Éprouve de la satisfaction face à sa réalisation

Compétence 3

Sait demander de l’aide

Compétence 4

Décrit ce qu’elle fait

Démontre son vocabulaire (hennin)

Compétence 5

Fait preuve de créativité

Représente en dessin les demi-cercles qu’elle me demande de découper

A une image en tête (représentation mentale) de ce qu’elle veut faire mais que le témoin ne découvre qu’au fur et à mesure de l’émergence de la forme.

Démontre sa connaissance du costume au Moyen Âge (nous avons lus des livres sur le sujet mais elle a aussi lu des livres «de princesses»)

Choisit les formes qui conviennent pour sa construction

Choisit les matériaux qui conviennent à son projet selon certaines caractéristiques (papier brillant)

Symétrie de la construction

Zoé se montre industrieuse, on la voit très engagée. Dans tout ce processus elle a démontré son sens de l’organisation, sa capacité de se procurer les matériaux et outils dont elle a besoin, de décider d’un projet et le mener à bien.

 

Si cette méthode est un peu plus longue, elle a l’avantage d’établir un dialogue personnalisé entre l’éducatrice/enseignante et l’enfant et les familles. C’est d’autant plus précieux pour les enfants qui débutent en milieu préscolaire car cela les valorise, augmentant leur estime de soi.

On pourrait aussi, pour nous aider dans nos observations, planifier «des invitations» avec du nouveau matériel, par exemple, pour cibler nos observations sur cette situation précise et noter les initiatives des enfants et leurs interactions avec les objets et les autres, etc.

Exemple :

 J’ai installé le rétroprojecteur.  Il y a aussi des plateaux avec du matériel varié (« loose parts»). N. (4 ans) expérimente avec toute sortes d’objets sur le rétroprojecteur.



Il questionne à voix haute. «Qu’est-ce que ça va faire ça?»  Il accumule les objets, préoccupé par l’effet, pas dans un but de représentation (observation, cause-effet).

 

 

 


Quel langage utiliser ?

Quand on fait des observations on utilise un langage descriptif (sans jugement ni interprétation au départ). Fawcett 2016 dans Ardelean .

Langage descriptif : Tu peux mettre les blocs sur la table

Jugement : Enfin! Place les blocs sur la table!

Interprétatif : Il a l’air fatigué et d’humeur maussade aujourd’hui, alors qu’il met les blocs sur la table.

Lorsqu’on écrit  des observations, il y a des mots à éviter et d’autres à privilégier(Grondlund 2014 dans Ardelean1) :

Au lieu de : 

L’enfant aime…                                                L’enfant choisit souvent de…

                                                                           Je l’ai vue faire… x nombre de fois

                                                                           Je l’ai entendu dire : « J’aime ça …

Il ou elle a passé beaucoup de temps…     Elle a passé dix minutes à…

Il semble que…                                               Il ou elle a dit que…

On dirait que…                                               Presque tous les jours il ou elle a…

Je trouve que…                                              Une ou deux fois par semaine, il ou elle... 

Il ou elle fait bien cela…                               Il ou elle fait… de telle ou telle façon

Elle n’est pas bonne dans…                          On a observé que chaque fois que…

C’est difficile pour lui ou elle de…

Les interprétations et les questionnements par rapport au pourquoi viendront après (« Je me demande, je pense, j’ai l’impression, est-ce parce que…»).                                              

Exemple :

 Chaque jour G. (4 ans)  va  jouer avec les instruments de musique. Ces trois derniers jours, c’est le tamboa (il range la mailloche à sa place, dans le petit trou prévu sur l’instrument) et la flûte avec lesquels il joue. Il démontre son intérêt pour les sons, la musique et son soin pour le matériel.

Bien sûr nos observations auront lieu dans différents contextes : dans le local, à la collation, dans les activités au gymnase, dehors, etc., et seront complétées, par les observations des parents et, en milieu scolaire, par les observations faites au service de garde ce qui parfois donne un tout autre portrait de l’enfant.

Évidemment, connaître le contexte familial des enfants est d’une aide précieuse pour mieux comprendre les enfants.

 

 La documentation

L’ensemble de nos observations, de nos photos, vidéos et enregistrements ainsi que nos commentaires vont constituer une riche documentation qui témoigne à la fois de comment les enfants apprennent et ce qu’ils apprennent et de leur développement mais aussi de nos façons de travailler. Cette documentation va être partagée de différentes façons : internet, des panneaux/affiches, journal individualisé, de grands cahiers à anneaux avec photos et commentaires, diaporama, exposition, etc.

Vous trouverez des exemples de documentation dans: Documenter le jeu, à quoi ça sert? : https://jeulibrequebec.blogspot.com/p/documenter-le-jeu-quoi-nca-sert.html

Nos observations et notre documentation vont donner lieu à une analyse de ce qui est révélé à propos des idées des enfants (souvent inattendues), leurs points de vue, leurs préoccupations, leurs théories.

Elles serviront pour évaluer les enfants et nous donner des pistes pour décider comment bâtir sur les expériences antérieures des individus et du groupe.

Exemple : N.et G. jouent souvent en ce moment avec les blocs, les rampes et les petites autos et commentent leurs trajectoires.

En relisant «Physical Knowledge in Preschool Education», je pense à du matériel que je pourrais leur proposer. J’imagine qu’ils aimeraient une catapulte. J’ai justement des rouleaux en carton. Je vais ajouter une planche et des objets légers et mous (éponge, balle en papier ou mousse) qu’ils pourraient propulser sans danger. Cela leur ferait travailler la notion de levier.

Je pourrais rajouter des rondins et ils pourront explorer ce qu’on peut faire avec un planche et ceux-ci (déplacer des choses, se déplacer) ou d’autres actions que j’ignore.

Je pourrais aussi, profitant ce nouvel intérêt pour la construction, remplacer la balle de ping-pong du pendule par une balle de tennis et l’élastique par une corde et les inviter- si cela se présente, après qu’ils aient joué comme ils le veulent et selon leur intérêts- à utiliser le pendule pour faire tomber des constructions. Je crois qu’ils vont aimer viser sur les tours qu’ils auront construites (notion de trajectoire, anticipation, force, cause/ effet). C’est un peu comme le jeu de quille mais cette fois on n’a pas besoin de lancer la balle, on a qu’à la soulever puis la laisser aller.

Ou installer un pendule avec un cône au-dessus du bac à sable. Mettre du sable noir dans le cône pour bien voir les dessins et donc la trajectoire de celui-ci.

Nous sommes des chercheurs qui tentons d’investiguer les comportements des enfants en recueillant des faits, utilisant plusieurs méthodes d’observations au besoin et nous nous posons toutes sortes de questions, par rapport aux différents enfants, qui orientent nos observations et nos actions.

L’évaluation est liée à l’observation et vice versa : je vais évaluer ce que j’ai observé et je vais aussi observer ce que je veux évaluer de façon plus précise.


Évaluer les enfants dans le jeu



Dans cette photo, on voit bien la communication entre les deux garçons pour élaborer leur construction collaborative.

 





Évaluer les enfants juste pour les catégoriser, leur mettre une étiquette n’est pas approprié au préscolaire.

Nos observations et notre documentation au quotidien et dans le jeu, restent les meilleurs outils pour évaluer le bien-être, la croissance, le développement, l’engagement, les compétences, les habiletés, les apprentissages, les connaissances, les stratégies… des enfants.

L’évaluation c’est beaucoup plus que les notes ou cottes dans un bulletin (qu’il serait préférable d’éviter au préscolaire, mais parfois, on n’a pas le choix, la décision venant d’ailleurs).

Lors de rencontres avec des parents, l’évaluation est une sorte de condensé de toutes nos observations et documentation.

On pourra alors illustrer nos propos sur le développement physique, affectif social, moral, cognitif, les aptitudes et attitudes de leur enfant avec des exemples tirés de notre documentation (photos ou vidéos à l’appui, si possible). C’est en général très apprécié.

Exemple : «S. progresse bien en… L’autre jour elle a… En voici deux exemples…».

Pour mieux comprendre cette forme d’évaluation, voir l’article : Évaluer autrement :https://jeulibrequebec.blogspot.com/2021/01/la-documentation-et-les-recits.html


Certaines considérations :

-          On se concentre plus sur ce que l’enfant sait faire que ce qu’il ne sait pas faire, privilégiant les observations positives

-      S’assurer que les enfants savent ce que nous faisons et sont à l’aise avec cela (en général ils adorent qu’on rapporte leurs dires et qu’on montre ce qu’ils font, cela donne de l’importance et valide leurs apprentissages).

-      On essaie de faire participer les enfants dans une co-évaluation de leurs apprentissages en passant avec eux à travers notre documentation.

-      S’assurer que les parents sont au courant de notre démarche et y participent

-      S’assurer que nos documents sont bien conservés

Conclusion



Photo Garden Gate

Ces deux garçons montrent leur intérêt pour les fossiles qu’ils sont en train d’examiner.

 



Nous privilégions les formes descriptives des agissements des enfants plutôt que les méthodes formatées.

Nous croyons que «l’un des principaux outils de l’enseignant est le travail quotidien d’observation et de documentation visuelle des processus à l’œuvre chez l’enfant. Ce travail nous permet de recueillir une grande quantité de matériel à analyser, interpréter, discuter 9 ».

«Les fragments que nous récoltons sont tellement précieux et le travail de réflexion de l’adulte si important que nous pouvons considérer le travail de documentation comme la source la plus extraordinaire de connaissance et d’évolution de notre profession 9».

L’observation/documentation va contribuer au développement personnel, professionnel de l’adulte et à son plaisir d’éduquer et d’enseigner 9.

Souvent ce que nous voyons à première vue, n’est que la pointe de l’iceberg. L’observateur attentif, du jeu des enfants, va se rendre compte de l’intensité de leur activité, de leur curiosité, leur sociabilité et leurs compétences, leurs motivations. Il va apprécier leurs théories sur le monde, leurs solutions aux problèmes, leur imagination, leur enthousiasme et leur élan de vivre.3

Il va aussi constater l’impact de ses décisions.

 Souvent, l’intérêt démontré par l’adulte va accroître le temps d’engagement de l’enfant.

 Mais ce matériel est aussi un atout pour les familles et pour «quiconque souhaite se rapprocher des stratégies de la pensée des enfants 9».

 

Références :

Ana Ardelean, Ana, Observing Play and Evaluating Learning : https://www.youtube.com/watch?v=m6D9NBEtx44

Drummond M. J. (1993) Assessing children’s learning. London, David Fulton.

Fawcett, M. Watson, D.  (troisième édition), 2016. Learning through Child Observation,

Jessica Kingsley Publishers, London and Phildelphia.

Fleet A.; Patterson C. and Robertson J. (2017) Pedagogical Documentation in early years practice: seeing through multiple perspectives

Kashin, D. Observation in ECE: It’s only the beginning, Technology Rich Inquiry Based Research: https://tecribresearch.blog/2022/12/16/observation-in-early-childhood-education-it-is-only-the-beginning/

Lois S.  Observing Young Children. A Froebelian approach, Froebel Trust: https://www.froebel.org.uk/uploads/documents/FT_Observing-young-children_Pamphlet_INTERACTIVE_REV-2.pdf

Neaum (2016) Observing and assessing children’s learning and development, Chapter 8, Sage Publications: https://study.sagepub.com/sites/default/files/Neaum%2C%20S.%20%282016%29%20Observing%20and%20Assessing%20Children%27s%20Learning%20and%20Development.%20London%2C%20Sage._.pdf

Peterson, G. Elam, E. (2020) Assessment in Early Childhood Education, College of the Canyons, California: https://childdevelopment.org/docs/default-source/pdfs/observation-and-assessment-english2-8-20.pdf?sfvrsn=1e9226c1_2

Vecchi, V. (2004) Les multiples racines de la connaissance dans Reggio Emilia, 40 ans de pédagogie alternative. Sur les pas de Loris Malaguzzi, Enfants d’Europe No. 6, février. Le Furet et Grandir à Bruxelles.

Notes :

Les codes de couleurs correspondant aux couleurs des différents domaines dans le programme cycle du préscolaire. Comme cela je peux voir si j’ai négligé un domaine et m’y attarder davantage.

* Cette histoire a déjà été publiée dans Le Préscolaire de l’AÉPQ.

Pour imprimer le document complet en pdf: https://drive.google.com/file/d/1PGm87O1-ezlKf6NaFbxFGXBWqNld88Hr/view?usp=sharing

Observer les enfants au quotidien et dans le jeu pour évaluer leurs progrès, mais pas seulement… : Première partie

 Par Anne Gillain Mauffette

 Pour voir l'article au complet: https://jeulibrequebec.blogspot.com/2023/06/observer-les-enfants-au-quotidien-et.html


 

C. (5ans), explore les formes circulaires en faisant d’abord une pizza puis une roue de bicyclette (représentation symbolique, formes, grandeurs). Photo : Froebel Trust

 

 






« Observer avec une attention et une conscience accrue augmente la possibilité de vraiment voir comment l’enfant apprend et sa façon d’être». (Fleet Patterson and Robertson 2017)

« L’observation seule, n’est pas suffisante. Il faut que nous comprenions ce que signifie ce que nous voyons, entendons» (John Dewey)

Introduction :

Pourquoi observer ? Pour pouvoir soutenir les enfants dans leur développement et leurs apprentissages.

«L’enseignement intentionnel commence avec des observations et une documentation systématique du développement et des apprentissages des enfants» (Gronlund, 2014, dans Ardelean1).

À travers l’observation nous tentons de cerner l’enfant dans sa totalité, pour le comprendre et faire une évaluation authentique de celui-ci.

 L’observation des enfants au jeu est une entreprise fascinante, absorbante et surprenante. Nous savons toutes que le temps de jeu des enfants est un moment privilégié pour acquérir des informations en observant les enfants, car ils y démontrent tous leur acquis et la richesse de leurs jeux ainsi que les aspects à parfaire. Mais ils y révèlent aussi leurs intérêts. On va découvrir leur vie, leurs motivations. On va pénétrer leur pensée et les raisons de leurs actions et décoder leurs sentiments.

Ces observations peuvent être spontanées ou planifiées. Elles vont nous guider dans l’élaboration des situations proposées par la suite.

En fait, dans notre pratique quotidienne, nous nous servons de l’observation tout le temps et nous évaluons continuellement les enfants en remarquant ce qu’ils font, comment ils le font, leur développement, leurs apprentissages visibles, cherchant à les comprendre pour mettre cette compréhension à bon usage.

L’observation et l’évaluation font partie du processus de curriculum émergent c'est-à-dire d’une planification qui s’adapte et évolue en fonction des enfants.

Il s’agit du cycle de l’observation :

-          Planification (l’environnement, les situations, le matériel, l’horaire, les déplacements, etc.).

-          Implantation

-          Observation

-          Interprétations

-          Réflexion (seule ou avec d’autres)

-          Évaluation

-          Ajustements et individualisation

C'est en fait, une boucle sans fin où l’adulte planifie un environnement, du matériel, des expériences; observe et documente ce que les enfants font et disent (et ne disent pas verbalement); analyse et interprète ces informations; revisite la documentation avec les enfants et si possible avec d’autres adultes afin d’avoir plusieurs points de vue; planifie les adaptations à faire, les nouvelles possibilités à proposer et recommence le cycle.

 


 Observer le monde à travers plusieurs angles et lentilles.

L’interprétation collaborative des observations recueillies, lorsque c’est possible, s’avère fort utile.

Photo dans Observation and Assessment

 


On nous a appris qu’une observation se devait d’être objective : on décrit ce qui se passe sans faire de suppositions; on consigne des faits.

Mais une fois ces informations consignées, il faut bien les interpréter. S’interroger sur le sens de ce qu’on a noté. Et interpréter veut nécessairement dire subjectivité. D'ailleurs, juste par le choix de ce qu’on observe, on est déjà dans la subjectivité. On est influencé par ce qu’on connait du développement de l’enfant, nos théories pédagogiques, notre vision de l’enfance et de l’enfant, ce qu’on valorise, notre bagage culturel et familial, nos expériences comme enfant, notre genre, notre idée de la « normalité», nos préjugés, les hypothèses que nous avons déjà en tête, etc.

 

Les fonctions de l’observation :

Quand on pense observation/évaluation, on pense tout de suite que cela s’applique à un enfant.

On peut en effet s’attarder à des aspects d’un enfant en particulier :

·  Son état émotionnel (vitalité, expression faciale et corporelle, passivité, retrait)

· Son développement physique et moteur

· Sa concentration

· Sa persévérance

· Sa motivation, son engagement

·  Son langage

 








Exemple :

G. «Où est ma toque ?» demande-t-il. (vocabulaire). Le voilà qui confectionne un dessert (exploration des quantités, des liquides et des solides, degré d’absorption, etc.). Découvrant une pipette. Il prend de l’eau. Il laisse tomber des gouttes dans le sable. Cela fait des traces. Il dit : «Je fais des lettres» (intérêt pour l’écrit).

· Ses façons de communiquer verbalement et non verbalement

·  Son niveau d’interactions avec l’adulte, avec un ou des enfants

· Sa perspective de l’autre

Exemple : 18 Janvier (Z. 5ans)

Z. montre un petit tatouage temporaire de serpent qu’elle a reçu à la garderie scolaire. Elle me fait remarquer qu’il brille. Elle explique qu’elle espérait bien l’avoir. Elle s’était dit, en le voyant, que les filles ne le voudraient pas (sans doute pas un thème apprécié) et les garçons non plus, parce que trop « cute». Mais en fait, c’est elle qui a pu choisir la première et donc elle a pu l’avoir. Quand je lui signale qu’elle avait fait de bonnes hypothèses, elle me répond « Je devine dans leur tête».

Note : C’est intéressant de voir comme elle est capable de réfléchir sur la pensée, les intentions probables des autres. Cette capacité d’imaginer la perspective d’un autre est essentielle pour comprendre l’autre et avoir des rapports harmonieux avec l’autre. C’est aussi une capacité nécessaire pour la compréhension en lecture (intention du personnage, justification de l’action). On voit que Z. est capable d’inférences et aussi de métacognition (penser à propos de sa pensée).

· Sa créativité, flexibilité

· Ses connaissances sur le monde

Exemple: Aujourd’hui, G.(5 ans) a fait un dessin de toutes sortes d’insectes.

Il  les nomme en les pointant : «J’ai fait deux libellules, deux abeilles, une mouche. J’ai même fait un moustique (l’orange et bleu avec son dard noir), une fourmi et une coccinelle. J’ai fait un papillon monarque (l’orange et noir) et un bleu (ses préférés) et un rayé de mon imagination»

En plus de sa capacité d’observation et de représentation des insectes et son vocabulaire, je remarque combien sa motricité fine s’améliore : il contrôle beaucoup mieux son geste et peut faire des formes plus petites. Je note aussi que dans ces trois derniers dessins il diversifie ses représentations et intérêts car jusqu’à présent, beaucoup de ses dessins représentaient des personnages de films de super héros.

· Les concepts qu’il aborde

Exemple :

G. (5 ans) joue pour la première fois au jeu de société «Trouble». Il est concentré et sourit. Je constate qu’il sait lire les chiffres de 1 à 6 sur le dé, et rapidement. Il bouge bien son pion de case en case (en comptant de vive voix) même si quelque fois il a tendance à compter la case où il est (concept de nombre et correspondance un à un).

· Les schémas qu’il développe (joindre, envelopper, cacher, transporter, aligner, faire des rotations, trajectoires,  etc.)

Exemple :

E. (4 ans) joue avec les autos. Il attache souvent des petites cordes avec des crochets à toutes sortes de choses. Il est la remorqueuse (un personnage d’émission pour enfants ?).

Note : lui fournir un rouleau de corde pour qu’il puisse dérouler, couper et attacher ensemble des choses pour les tirer, soulever.

· Son intérêt pour l’écrit

Exemple : Z. 5 ans, 2 février

J’avais mis sur le tableau magnétique, des lettres magnétiques.

J’avais inscrit :            route

Et en dessous du r : s

                                    t

                                    j

Elle remarque le changement, elle voit le mot. Je le lui lis.

Puis je lui montre qu’en remplaçant la lettre initiale on forme d’autres mots : soute (à bagages), toute, joute («de soccer» lui dis-je, «non, de chevaliers» rétorque-t-elle). Ensuite elle me dit : Si dans soute on remplace le t par p ça fait soupe». 

Elle a donc compris comment en mettant les lettres dans un certain ordre on obtient différents mots. Elle est en bonne voie vers la lecture/écriture.

-          · Etc.

Mais l’observation peut s’attarder au contexte, à un objet d’étude, à un individu, à un groupe,  au résultat de nos interventions, à nous-mêmes. Elle peut avoir plusieurs buts et prendre plusieurs formes selon sa fonction.

En fait il faut d’abord définir la raison pour laquelle on veut observer. Cela va nous orienter dans notre choix du sujet de l’observation et de la méthode ou des méthodes qu’on veut utiliser (notes, vidéos, enregistrements, etc.).

Elle peut avoir comme objectif d’aider l’adulte à:

-          Mieux comprendre les enfants 

-          Identifier les apprentissages visibles et invisibles, c'est-à-dire moins évidents 

-          Surveiller leurs progrès 

-          Identifier des aspects à développer

-          Planifier des situations d’exploration/apprentissage, le matériel, l’organisation 

-          Communiquer avec les parents, les enfants, et autres personnes impliquées dont les administrateurs

-           Remplir les fameux bulletins 

-          Rédiger les portraits des enfants

Mais on peut aussi vouloir examiner :

-          L’atmosphère de la classe

-          Des aspects de l’aménagement  (coins surpeuplés ou délaissés, rangement du matériel, etc.)

-          Quelles activités provoquent l’engagement des enfants

-          Quelles différences entre l’engagement des filles et des garçons pour certaines activités; comment les atténuer?

-          Quels types d’activités créent plus de communications?

-          Où et comment des disputes commencent-elles, qu’est-ce qui les exacerbe?

-          Les interactions dans le groupe

-          Qui joue avec qui? Y a-t-il des exclusions à répétition?

-          Comment des amitiés sont en train de se créer

-          Les stratégies de pensées des enfants, leurs trouvailles, leurs habiletés et connaissances

Exemple :

En arrivant G. annonce : je vais faire un dessin. Il choisit les crayons feutres et les met sur la table. Il se met à dessiner utilisant un crayon, le rebouchant consciencieusement et le remettant dans son boitier. Puis en reprend un autre…À un moment donné, il décide de vider les deux boîtiers à côté de lui et reprend son manège. Je comprends alors qu’il voulait utiliser toutes les couleurs et voyant que c’était difficile de se rappeler quelles couleurs il avait déjà utilisées, il a trouvé une stratégie : en les mettant dans un tas et en les prenant un à un et les rangeant systématiquement dans les boîtiers, il pouvait savoir ceux qu’il n’avait pas utilisés (il y en avait beaucoup). Je l’entends qui commente de temps en temps : «Ça c’est un beau rose» ou «il y a encore de la place ici».

Il a travaillé pendant trente minutes !



(Exploration des couleurs, persévérance, stratégie d’organisation, suit son plan, sens esthétique, estimation de l’espace, prend soin du matériel).

-          





   


  -    Mieux comprendre certains comportements

-          Un domaine de développement (ex : le langage des enfants) ou une habileté particulière (la motricité fine par exemple).

-          Une activité spécifique

Exemple : Ce que les enfants apprennent en jouant dans le sable et l’eau.

On a bien sûr toujours en tête les composantes des programmes qui nous régissent (Programme cycle pour les maternelles, Accueillir la Petite Enfance pour les CPE).

L’observation va faire partie de notre planification; on va prévoir des temps pour le faire et les moyens qu’on va utiliser.

 

L’évaluation

Quant à l’évaluation, il y a plusieurs raisons d’évaluer :

pour mieux comprendre et enseigner

- pour des raisons administratives et rendre compte

- pour faire de la recherche

- pour informer les parents du cheminement de leur enfant

Et plusieurs formes d’évaluation : formative, diagnostique, sommative, environnementale et informative.

-           L'évaluation formative veut suivre le progrès  de l’enfant. C’est un processus constant, puisque l’enfant évolue tout le temps et qui sert à illustrer certains domaines de développement et d’apprentissages, des sentiments, des relations sociales, etc. Il s’agit de mieux comprendre l’enfant pour adapter nos interventions ainsi que pour planifier pour le groupe. Elle renseigne aussi l’enfant sur ses réalisations et progrès.

-           L'évaluation diagnostique  identifie les obstacles à certains apprentissages et certains domaines où l’enfant a besoin d’aide particulière. Elle est généralement réservée à des spécialistes.

-          L'évaluation sommative se passe à certains moment (trimestre, fin de parcours) et cherche à établir la somme des progrès réalisés et des apprentissages.

Si faite sous forme de «tests», centrés sur certains critères, elle ne donne pas beaucoup d’informations sur la façon d’apprendre de l’enfant ou sur certains domaines non mesurés.

Les tests, même s’ils ont encore cours, ont pourtant été très critiqués pour les jeunes enfants. Cette forme d’évaluation qui cherche à mesurer le développement selon des normes préétablies donne une image très partielle des enfants et a des impacts sur le contenu dans les classes qui a tendance à s’aligner sur ces critères étroits et à diminuer ou carrément exclure d’autres activités.

Il y a bien sûr d’autre façons de noter les progrès des enfants (sans notes, ni cotes, ni étiquettes) dont le portfolio,  la documentation.

-           L'évaluation environnementale n’est pas centrée sur une enfant en particulier, même si l’observation des enfants en fait partie, mais tente d’évaluer la qualité de l’environnement offert en termes d’équipements, du type de relations avec les adultes, des activités proposées, etc. Elle donne des pistes de choses à améliorer.

-          L'évaluation informative concerne le partage d’informations sur les enfants, entre les parents et les enseignantes. Le portfolio en serait un exemple, des échanges par internet aussi ainsi que la documentation partagée.

Pour choisir la forme d’évaluation, on peut se poser la question suivante : Comment cette évaluation va-t-elle aider les apprentissages ?

En principe, l’évaluation ne devrait pas être une interruption de la vie quotidienne mais un processus constant de ce que les enfants font et comment ils le font.

 

Les techniques d’observations :

Il y a aussi plusieurs techniques d’observation:

-          Naturaliste :

C’est une approche écologiste qui a l’avantage de faire un portrait de l’étendue et de la complexité d’une variété de comportements. Cela se passe toujours dans le contexte naturel de l’enfant et tient compte de sa situation en général. L’observateur va noter tout ce qu’il peut de ce qu’il voit (ou l’enregistrer). Le désavantage est la quantité d’information avec laquelle on doit composer. En général, on écrit au temps présent.

 Cela s’appelle en Nouvelle Zélande des «Learning stories», des récits d’apprentissages au Nouveau Brunswick, la narration pédagogique en Colombie Britannique et documentation pédagogique à Reggio Emilia et ailleurs.

-          Les vignettes

Il s’agit de faire un court rapport d’un événement du quotidien qui est écrit comme une histoire. Cela peut être quelques lignes ou un paragraphe. On y décrit  actions et les interactions des enfants. Cela donne l’impression au lecteur d’être là. Cela permet le partage d’expériences avec les autres. Toutes les vignettes étant uniques, elles sont des illustrations d’un moment.

Exemples : 22 janvier.

G. (3 ans) fait tourner une toupie. La toupie tourne longtemps. Je dis : « elle tourne pendant une éternité». Il commente : « éternité, éternuer ». Il fait preuve de discrimination auditive et de conscience phonologique.

Ce n’est qu’avec leur accumulation qu’on peut tracer un portrait de certains aspects de l’enfant.

Un  mois plus tard : « Croix ça rime avec Roi» dit G. (discrimination auditive, conscience phonologique, notion de rime).

Quelques semaines plus tard : G. dit : « danger, c’est comme ange». Il s’agit du milieu du mot ce qui est plus difficile que le son initial ou de la fin du mot.


-          L’approche des écoles préscolaires de Reggio Emilia :

On ne peut pas passer sous silence, les stratégies pédagogiques des écoles de Reggio Emilia qui font de l’observation et la documentation le cœur de leur fonctionnement et qui bâtissent toutes les expériences proposées aux enfants à partir de celles-ci.

Ces écoles fournissent une abondante documentation sur les processus utilisés par les enfants et les enseignantes elles-mêmes. Celles-ci (elles sont deux dans la classe) vont noter sur une grande feuille les dire des uns et des autres dans les moments de discussions. Elles documentent les productions des enfants (dessins et représentations en 3 D) et les mots des enfants, par des écrits, des photos et des vidéos et y intègrent leurs réflexions et décisions. Elles présentent souvent le tout sur des panneaux. Cela donne beaucoup d’informations aux enfants, parents  ou toute personne intéressée sur ce qui se passe dans le groupe. Cela provoque des discussions qui amènent d’autres éclairages sur les expériences vécues et qui seront, elles aussi, documentées. Tout cela trace un riche portrait des enfants, du groupe ainsi que de leur pédagogie. Cela peut aussi prendre la forme d’un journal pour chaque enfant et de publications.

Cette documentation sert d’évaluation continue.

-          L’échantillonnage (Time Sampling et Target Child) :

Des observations faites pendant une minute à plusieurs reprises, dans une heure, qui peuvent être centrées juste sur un enfant ou sur un espace dans le local selon ce que vous cherchez à voir : exemple suivre un enfant pour voir dans quoi il s’engage et avec qui, combien de temps, la fréquence d’un comportement ou vérifier la fréquentation d’un coin par combien d’enfants pendant combien de temps et leurs interactions

-          Les fameux « checklist» (grilles à cocher) :

 On y observe des  aspects précis prédéterminés du comportement des enfants.

Le désavantage de ces «tests» est de passer sous silence (et de nous rendre aveugles) à la richesse de l’individu en se concentrant sur la mesure de dimensions choisies, facilement mesurables et l’atteinte de certaines normes. Les critiques évoquent la stigmatisation et l’étiquetage qui en résulte quand les professionnels sont trop centrés sur des critères et normes de développements étroits.

Cela peut entraîner des attitudes de compétition, de l’anxiété chez les parents, une sous- évaluation ou surévaluation des capacités de l’enfant et une rigidité à propos des progrès de l’enfant.

Par contre les grilles peuvent être utiles pour évaluer la sécurité d’un terrain par exemple.

-          Une note sur les photos et vidéos et enregistrements pendant que les enfants jouent:


Ces trois photos témoignent d’une communication entre ces deux enfants  et de leur intérêt l’un pour l’autre (développement social). Photo Garden Gate

Les photos sont le moyen le plus rapide pour garder des traces d’un moment, d’un processus, d’une réalisation et un moyen efficace pour réactiver notre mémoire et celle des enfants.

Enregistrer les conversations des enfants pendant qu’ils « travaillent» la glaise ou la pâte à modeler, va vous donner une mine de renseignements utiles.

Installer une caméra dans le coin bloc ou le coin de jeu symbolique et laisser aller l’enregistrement, n’est pas difficile. On regardera l’enregistrement plus tard et choisira des séquences à partager avec les enfants ou les parents en ajoutant des commentaires pour ceux-ci.

Apprendre à observer, c’est-à dire à voir et écouter et décrypter le sens les actions des enfants et arriver à utiliser les mots justes pour décrire des comportements dynamiques, complexes, est difficile; mais heureusement on s’améliore avec la pratique.

Pour voir la deuxième partie:https://jeulibrequebec.blogspot.com/2023/06/observer-les-enfants-au-quotidien-et_12.html

Pour imprimer le document au complet en pdf: https://drive.google.com/file/d/1PGm87O1-ezlKf6NaFbxFGXBWqNld88Hr/view?usp=sharing

En cette journée de l’enfant, des enfants…

Prenons la résolution : Photo  Garden Gate   De célébrer leur compétence, leur créativité, leur curiosité, leur énergie, leur désir de com...