mardi 23 juin 2020

Le développement exécutif par le jeu : Le jeu libre et le développement du cerveau

Cerveau, mémoire, imaginaire
Document préparé par Richard Robillard et Brigitte Fortin

Cinquième partie

Le jeu libre et le développement du cerveau
  • D’instinct, les humains ont, à travers les époques, laissé les enfants jouer librement dans la petite enfance. Puis, l’école a pris le relais et structuré les apprentissages. Pourtant, le jeu libre entre enfants -se rouler par terre, chahuter, courir ensemble – favorise le développement du cerveau.
  • Des études confirment que disposer de périodes moins structurées aide les enfants à développer les fonctions exécutives qui sont la clé de l’apprentissage (Barker et al., 2007): notamment, la résolution de problèmes, la créativité (Ginsburg, 2007), la capacité de porter une attention soutenue (Barkley, 1997), et une meilleure maîtrise de l’impulsivité (Singer, 2002). Un article publié dans la Harvard Education Review soutient que le développement intellectuel de l’enfant découle en premier lieu de sa curiosité, un mécanisme qui nourrit l’apprentissage (Engel, 2011).
  • Une étude de 2011 a établi que la créativité des enfants d’âge préscolaire jusqu’à la troisième année avait décliné de façon considérable au cours des vingt dernières années. On parle souvent d’une crise de la créativité au sein du système d’éducation et, plus globalement de la société. Csikszentmihalya, un expert en matière de créativité, affirme que le fait de prendre plaisir à une tâche et de laisser libre cours à sa créativité nous positionne avantageusement à mi-chemin entre l’ennui et l’anxiété.
  • L’anxiété survient quand la tâche est trop difficile relativement au degré de compétence de la personne. La frustration qui en découle atrophie la capacité d’apprentissage. Au contraire, l’ennui servient quand la tâche est trop facile. S’il n’y a pas de défi, on perd complètement la motivation.
  • En somme, les activités trop structurées qui priorisent la discipline au lieu de l’inventivité et de la découverte confinent les enfants dans l’ennui ou l’anxiété. Le jeu passif proposé par les écrans rend l’esprit paresseux et fait que l’enfant s’ennuie de plus en plus facilement.
  • L’enfant recherche naturellement un espace entre l’ennui et l’anxiété, un espace qui s’avère un défi accessible. Et comme l’enfant est conscient de ce qu’il est capable de faire ou non, il trouve plus facilement son équilibre dans le jeu librement choisi qui lui permet, à son rythme, d’évoluer en difficultés.
  • La découverte guidée s’avère un solution mitoyenne, car l’enfant a besoin d’être accompagné avant de pouvoir faire seul.
  • L’Écuyer, 2019


  • La zone proximale de développement
  • Vygotsy (1978) définit ceci comme la zone proximale de développement. Selon lui, cette zone est limitée par les comportements qui se développeront dans un futur proche. Le terme proximal se réfère à des comportements qui vont éventuellement émerger, mais ceux qui sont le plus susceptibles de le faire à n’importe quel moment. Ainsi, ce que l’enfant fait avec de l’aide aujourd’hui, il sera en mesure de le faire seul demain.
  • Il décrit deux niveaux : la performance indépendante et la performance assistée. Le premier implique que l’enfant sait et qu’il peut faire seul. Le deuxième signifie que pour arriver à son maximum de potentiel, il a besoin de l’assistance de l’adulte.
  • Bodrova et Leong, 2007


  • En éducation, nous avons tendance à évaluer l’enfant sur ce qu’il peut accomplir seul. Vygotsky soutient que ce n’est pas le seul élément à considérer et que ce n’est pas suffisant pour définir le développement d’un enfant.
  • Selon Vygotsky (1978), quand les enfants jouent, ils créent leur propre zone proximale de développement et établissent eux-mêmes les défis appropriés à leur niveau de développement. Le jeu libre permet ainsi plus facilement d’accéder à sa zone proximale de développement de façon autonome.
  • La ZPD n’est pas statique et se modifie à mesure que l’enfant évolue dans les diverses compétences. À chaque avancée, l’enfant arrive à comprendre et faire des choses de plus en plus complexes. À chaque nouveau niveau, il requiert le soutien de l’adulte pour ainsi atteindre le niveau suivant et ainsi de suite.
  • Chaque enfant n’a pas besoin du même soutien. Certains enfants requièrent peu d’aide, alors que d’autres ont besoin d’une aide soutenue à chaque nouvelle étape de leurs apprentissages, que ce soit au plan moteur, affectif, social ou cognitif.
  • L’approche ici n’est pas de voir l’enfant présent, mais plutôt l’enfant en devenir. Cela demande à l’enseignant d’être un fin observateur du développement de ses élèves, puisqu’il s’agit de leur présenter des tâches à leur portée.
  • Évaluer quelle est la zone proximale de développement pour un enfant, c’est de voir révéler quelles sont les habiletés sur le point d’émerger et de comprendre quelles sont les limites actuelles de l’enfant.
  • En ce sens Vygotsky était très conscient que l’apprentissage est social. L’enfant apprend tout autant par le jeu avec ses pairs qu’avec le soutien d’un adulte qui sait l’accompagner selon son niveau de développement.
  • À travers le jeu symbolique, l’enfant développe toutes ses fonctions exécutives. Par exemple, lorsqu’il joue à la cuisine, l’enfant choisit de jouer un personnage et il doit faire en sorte de demeurer dans ce personnage pour donner un sens au jeu. D’abord, il s’active pour prendre part à l’activité. Ensuite, il planifie son rôle et tente de l’arrimer avec celui des autres (planification). Cela lui demande de se souvenir de ce qui s’est passé auparavant (mémoire). Lorsqu’une réponse n’est pas attendue, l’enfant doit s’ajuster afin que le jeu continue d’avoir un sens (flexibilité cognitive). Il ne peut faire tout ce qu’il veut sans réfléchir, car il mettrait le jeu en péril (inhibition). Finalement, il est peu probable que cela ne se fasse dans l’harmonie totale. La régulation émotionnelle sera alors sollicitée.
  • Il augmentera la complexité de son jeu à mesure qu’il se sentira compétent pour le faire et progressera ainsi vers des niveaux supérieurs pour sophistiquer ses apprentissages.
  • Brodova et Leong, 2007


Suite : Le jeu : lieu de naissance de l’identité individuelle

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1 commentaire:

  1. J'avais assisté à une conférence qui parlait justement de ça, et je suis convaincue que plus un enfant expérimente, explore, s'amuse et stimule toutes les sphères de son développement.

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